Un quart des ventes de vins en moins ?
Les États-Unis et l'UE ont finalisé le 21 août leur accord commercial instaurant des droits de douane plafonnés à 15 % sur les produits européens, y compris les vins et spiritueux.

« Malheureusement, nous n’avons pas réussi à ce que ce secteur » soit inclus dans les exemptions, a déclaré le commissaire européen Maros Sefcovic lors d’une conférence de presse en présentant les détails de l’accord commercial noué entre l’Union Européenne et l’administration Trump fin juillet. Il a ajouté que les discussions se poursuivraient et que « ces portes n’étaient pas fermées pour toujours ». Cette exemption aux droits de douane de 15 % pour les vins et spiritueux était vivement réclamée, en particulier en France et en Italie. Après des mois de négociations très âpres, Bruxelles et Washington ont scellé fin juillet un accord commercial basé sur des droits de douane de 15 % sur les produits européens qui arrivent aux États-Unis. C’est bien plus que le taux en vigueur avant le retour au pouvoir du président américain – autour de 4,8 %. Mais c’est moins que ce que le milliardaire républicain menaçait d’imposer au Vieux continent faute d’accord. Dans un court message posté sur X, continuant de ménager le président Trump en raison de la guerre en Ukraine, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a salué un texte qui offre « prévisibilité pour nos entreprises et nos consommateurs ».
« Immense déception » pour les exportateurs
La Fédération française des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS) a fait part de son « immense déception » le 21 août après que l’UE a annoncé avoir échoué à obtenir une exemption pour le secteur, qui sera taxé à 15 % à son entrée aux États-Unis. « Il y a une immense déception, parce qu’on a travaillé énormément pour obtenir l’exemption et elle était à portée de main. Nous avons la certitude que cela entraînera de grosses difficultés pour la filière des vins et spiritueux », a déclaré le président Gabriel Picard. D’après le Chagnotin, ces 15 % s’ajouteront aux « 15 % d’effets de change que la filière observe déjà » en exportant aux États-Unis, son premier marché, du fait de la faiblesse actuelle du dollar par rapport à l’euro. L’effet combiné « pourrait aboutir à une réduction d’un quart de nos ventes aux États-Unis, soit une perte de 1 Md€ », avait estimé le 1er août la FEVS. En 2024, la France y a écoulé 2,4 Md€ de vin et 1,5 Md€ de spiritueux (environ 25 % de ses exportations).
« La défense de nos secteurs à l’export reste notre priorité. L’accord laisse ouverte la possibilité d’exemptions additionnelles, nous y travaillerons », a réagi pour sa part le ministre français du Commerce extérieur Laurent Saint-Martin.
Annie Genevard « déplore le résultat »
« Je déplore le résultat de la négociation entre l’UE et les États-Unis sur le commerce des produits agricoles. Cet accord, déséquilibré, porte atteinte aux intérêts français et européens en matière agricole », a réagi la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, le 21 août sur son compte X. Elle ajoute que cet accord constitue « une source d’inquiétude majeure pour nos filières emblématiques » et regrettant « particulièrement l’absence d’exemption pour les vins et spiritueux, alors même que la France et d’autres pays avaient souligné l’importance prioritaire de ces produits ». Pour elle, ce dossier n’est pas encore clos. Elle espère que les négociateurs européens sauront convaincre leurs homologues américains de revenir sur cette décision. En attendant, elle demande à Bruxelles de prendre des mesures « pour soutenir les producteurs qui seraient pénalisés par ce résultat inacceptable ». En 2024, l’UE a exporté pour 8 milliards d’euros d’alcools, dont plus de 5 milliards de vins, aux États-Unis, son premier marché à l’exportation. La France représente environ 25 % de ses exportations. Le Copa-Cogeca (organisations professionnelles agricoles et viticoles Européennes) a vivement réagi, dans un communiqué, à l’annonce officielle que le secteur agricole, notamment les vins et spiritueux, se voit imposés des droits de douane supplémentaires de 15 % pour les exportations aux États-Unis. « Bruxelles a cédé, l’agriculture n’a rien obtenu », a expliqué le syndicat européen qui regroupe les agriculteurs et les coopératives. Cet accord « est profondément préjudiciable à un secteur déjà soumis à la pression de l’augmentation des coûts, des contraintes réglementaires et de l’intensification de la concurrence mondiale », regrette-t-il, soulignant « une erreur stratégique qui nuit aux agriculteurs, aux coopératives agricoles et aux économies rurales de l’Union européenne ». Le Copa-Cogeca demande à la Commission de poursuivre les négociations et de publier « en urgence une évaluation de l’impact de cet accord sur le secteur agricole de l’UE ».