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Maison Loron à La Chapelle-de-Guinchay

Une belle leçon pour l'avenir

Lundi, le nouveau Pôle viticulture et agriculture de l’Académie de Mâcon
organisait sa première visite-conférence en présence, entre autres, du préfet de
Saône-et-Loire, de la présidente du Pays Sud Bourgogne et du maire de Mâcon. Mécène, la Maison Jean Loron à La
Chapelle-de-Guinchay a alors livré quelques uns de ses secrets. Le BIVB
retraçant ensuite « la conquête des marchés des vins du Mâconnais ».
Par Publié par Cédric Michelin
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Les visites étaient faites par Philippe Bardet, président directeur général, ou Xavier Barbet, son prédécesseur. Avec 14 millions de bouteilles annuelles pour un chiffre d’affaires de 42 millions d’€, ce négociant traditionnel « sélectionne » sept mille échantillons dans les Domaines de la grande région. Le négociant les déguste quatre à six fois « pour être sûr de la qualité finale car, comme des enfants nés de parents différents, les vins peuvent évoluer différemment », expliquait Xavier Barbet, devant le laboratoire. Ce dernier fait jusqu’à sept cents analyses par jour, y compris en prestations de service. Après assemblages, au final, ce sont près de trois cents cuvées qui sont vinifiées. Outre les cuves de 450 à 1.100 hl, les neuf cents fûts de pouilly-fuissé constituaient incontestablement le clou de la visite. Le négociant vinifie, élève, stocke et commercialise sous plus de soixante-quinze étiquettes différentes, « selon les clients, les importateurs qui veulent leur nom… ».

135 ha en propriété


Le négociant répartit « bien » ses ventes entre la France, l’Europe et le grand export. Ainsi, les cavistes français représente 19 % du chiffre d'affaires France, la restauration traditionnelle 55 % et la grande distribution « se développe de plus en plus » depuis l’absorption de la Maison Colin-Bourrisset, située à Crèches-sur-Saône. L’export est lui aussi classique pour la Bourgogne en Europe (Benelux, Angleterre, Irlande…) et, au-delà, à destination des Etats-Unis, du Japon et de la Chine (13 %). Le commerce est au beau fixe. Les monnaies dévaluées d’Amérique du Sud ou russes ont cependant ralenti ces marchés.
Entré au capital en 2001, l’actionnaire majoritaire est le fond d’investissement Kopf, qui contrôle aussi la Maison Jadot. La Maison Loron est propriétaire de 135 hectares à travers le Domaine des Billards à Saint-Amour, le Château de la Pierre à Régnié, le Château de Fleurie, le Cellier de la Vieille Eglise à Juliénas, le Château de Bellevue à Morgon et des parcelles (cuvée Vieux Murs) à Pouilly-Fuissé.

Valeurs humanistes


Pour le président de l’Académie de Mâcon, la Maison « développe aussi des valeurs humanistes, en ne déconnectant pas l’économie de la culture, la valeur du travail des hommes et de leur savoir-faire ». Le préfet de Saône-et-Loire, Gilbert Payet, en tirait la conclusion que la Maison Loron « et son histoire depuis 1711, prouvent que malgré les crises du beaujolais déjà, elle en est toujours sortie plus forte et imaginative. C’est une belle leçon pour l’avenir ». Président du pôle viticulture-agriculture, Jean-Pierre Sylla confirmait justement la volonté de l’Académie « de produire des réflexions intellectuelles rigoureuses », notamment sur les modèles économiques permettant de maintenir un modèle agricole familial sur son territoire.

Clients passifs et actifs


La plongée dans l’histoire des vins mâconnais depuis le XVIIe siècle était à ce titre très instructif. Mâconnais d’origine et directeur du Pôle Marché de l’interprofession des vins de Bourgogne, Philippe Longepierre resituait l’évolution des surfaces : de 100.000 ha (entre 200.000 hl et un million d’hl/an) à l’époque à 6.000 ha en AOC mâcon de nos jours ! « En 1852, 15 à 25 % des cépages étaient encore blancs. Les rouges étant à la mode au Moyen-Âge ». Transportés en fûts par charrues vers Dijon ou par bateaux sur la Saône vers Lyon, les archives des taxes - de ces villes ou des routes - le prouvent. Déjà portés sur le transport multimodal, les Mâconnais passent ensuite par la route pour accéder à la Loire et monter directement sur Paris. « Puis tout a changé avec le développement du chemin de fer ». La Maison Loron en étant justement la preuve, elle qui est basée près de la gare de Pontanevaux.
La concurrence a fait le reste avec le temps. « Nous avions soixante-dix clients sur Paris et nous n’en n’avons plus que deux : Nicolas et France Boisson », précisait Xavier Barbet. C’est d’ailleurs le caviste Nicolas qui a poussé la Maison Loron à embouteiller. Les vins blancs du Mâconnais sont encore « plus concurrencés » depuis les années 1980. En 1994, le vignoble de Bourgogne représentait 44 % des surfaces de chardonnay dans le monde contre 14 % deux décennies plus tard. Idem en volumes.
Dernière (r)évolution en cours avec Internet, « de consommateurs majoritairement passifs, en attente d’informations, les clients changent : ils recherche directement l’information sur le web et même, ils donnent leurs avis et les partagent sur les réseaux sociaux », concluait Philippe Longepierre, en guise de mise en garde mais aussi pour saisir des opportunités de communiquer différemment…