Une culture à redécouvrir...
traversée du désert. La prise en compte des questions environnementales
et de nouvelles orientations culturales amènent un regain d’intérêt
pour cette légumineuse. Une fiche éditée par la chambre d’agriculture de
Bourgogne renseigne précisément sur les conditions de son implantation
et de sa culture.

La culture retrouve aujourd'hui un regain d'intérêt. Il faut dire que cette légumineuse ne manque pas d'atouts à faire valoir, alors que les besoins européens en protéines végétales restent importants, que les enjeux environnementaux plaident pour une réduction des intrants et que les dernières études économiques montrent que la marge semi nette de la luzerne n'est pas négligeable et peut même soutenir, à quelques euros près et sous certaines conditions, la comparaison avec d'autres cultures de vente…
Une vraie piste agronomique
On connaît les qualités environnementales de luzerne, sa capacité à préserver la qualité des eaux, à protéger les sols de l'érosion, tout en les structurant et à fournir naturellement et pendant deux saisons, de l'engrais azoté aux cultures suivantes. Le tout en restant sobre en intrants et sans grandes difficultés de culture, pourvu qu'on respecte dès le début les quelques règles d'or de son implantation.
Si elle a su se rendre indispensable en agriculture biologique, du fait justement de ses qualités agronomiques, la luzerne reste cependant une culture à redécouvrir, dont l'intérêt n'est pas toujours perçu à sa juste valeur. C'est ce qui a motivé notamment la rédaction d'une fiche régionale, éditée par les chambres d'agriculture de Bourgogne.
« La luzerne représente une bonne piste agronomique pour améliorer la rentabilité des systèmes », témoigne Ludovic Rémy, le conseiller technique en charge de la rédaction de cette fiche luzerne. Pour une meilleure gestion du désherbage et de l'apport azoté, cette culture trouve toute sa place dans les systèmes de cultures innovants, soit en association, soit en culture à part entière dans une rotation redimensionnée.
La fiche détaille les conditions de l'implantation et de la conduite de la culture, elle en évalue l'intérêt agronomique. Avec un premier avertissement « la qualité de la mise en place de la luzerne conditionne en grande partie son niveau de production pendant toute la durée de son exploitation ». Le précédent le plus favorable au semis étant l'orge d'hiver, qui permet un semis plus précoce et une levée rapide de la culture.
Une excellente tête de rotation
En Bourgogne, le choix variétal privilégie les critères de rusticité (résistance aux maladies et aux ravageurs) et de qualité (résistance à la verse et teneur en protéines). La teneur en protéines est un critère essentiel pour une production destinée à la déshydratation, comme cela peut être le cas, notamment sur les plateaux du Châtillonnais, où l'on a enregistré l'an passé de bons tonnages en dépit de l'impact de la sécheresse. Car si la plante résiste plutôt bien à la sécheresse du fait de son fort et profond enracinement, sa culture est à proscrire dans les sols hydromorphes.
Sur les plateaux, dont les terres à potentiel limité limitent également les possibilités de diversification de la rotation traditionnelle - colza, blé, orge -, la luzerne représente une solution agronomique satisfaisante. Introduite deux années sur six dans une rotation, la culture permet de casser le cycle des mauvaises herbes, assure des reliquats azotés importants et limite les désherbages. « La plante reste peu exposée aux maladies et aux ravageurs », constate Ludovic Rémy, qui observe également qu’outre son intérêt agronomique, « la rentabilité de la culture de la luzerne n'est pas si éloignée de celle d'une culture de vente traditionnelle ». Pour les producteurs "historiques", on atteint même « un quasi équilibre » et pour les autres, le différentiel est plus limité qu'on le pense dans le cadre d'une récolte à 10 tonnes de matière sèche par hectare.
Pour en savoir plus, la Fiche luzerne est disponible sur www.bourgogne.chambagri.fr
Un intérêt économique à ne pas négliger
Une rotation avec luzerne intégrée se décompose ainsi : luzerne - luzerne - blé tendre - Colza - blé tendre - orge d'hiver (etc.)
A noter que la libération de l'azote se poursuit sur deux campagnes, le blé et le colza en tirent ainsi profit.
La marge semi-nette d'un système luzerne est relativement inférieure à celle d'un système classique, mais il faut y intégrer des paramètres comme le temps de travail, l'IFT, les gains agronomiques par économie d'intrants, le moindre coût du travail du sol, le différentiel se réduit encore sensiblement. Sachant qu'il faut également tenir compte de l'effet des aides historiques sur les références DPU. Ainsi, pour les producteurs "historiques", la marge est sensiblement la même.
A intégrer aussi le fait qu'un blé cultivé après une luzerne peut voir son rendement augmenter de +5 %, selon le Cétiom.
Atouts et limites de la culture
Les atouts :
Econome en charges de structure
Peu d’intrants et pas de fumure azotée
Importants reliquats azotés
Fort pouvoir de restructuration des sols et bonne absorption des oligo-éléments
Action nettoyante vis-à-vis des adventices
Bonne résistance à la sécheresse
Fourrage de qualité, source de protéines fermières
Bonne valorisation économique face à un débouché existant
Potentiel de productivité établi et régulier
Les limites :
Production limitée en sols acides, inappropriée en sol hydromorphes
Apprécie peu les sols trop compactes
Attention aux risques de tassement en première coupe
Récolte de foin parfois difficile en première coupe en fonction du climat et de l’équipement requis
Respecter un intervalle de 6-7 ans entre deux luzernes pour des raisons sanitaires
Sensible à la verse
Peu de débouchés connus en valorisation énergétique de la biomasse