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L’agriculture française

Une diva à réveiller ?

La comparaison peut surprendre mais Jean-Marie Séronie l’argumente tout
au long de son essai[1] : l’agriculture française est une diva et, à
l’image de ces cantatrices brillantes et admirées, elle doit prendre
garde à renouveler son répertoire si elle veut rester en phase avec la
société.
Par Publié par Cédric Michelin
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Mettant en parallèle, d’une part, les atouts d’un secteur qui a fait et fait toujours la grandeur de la France et, d’autre part, le malaise ressenti aujourd’hui par les paysans français, l’auteur suggère que la solution aux difficultés actuelles serait en partie psychologique. Les agriculteurs se présentent souvent comme des victimes, de plus en plus marginalisés dans une société où leur nombre est en diminution, alors que les préoccupations environnementales remettent en cause leurs pratiques et que l’espace rural est concurrencé par d’autres activités.
Face à cela, de nouveaux défis nécessitent de faire évoluer le métier : la mondialisation du marché et la volatilité des cours, qui augmente l’imprévisibilité économique, l’équation d’une production quantitative mais respectueuse de l’environnement… Ces exigences demandent des compétences nouvelles de stratège et de gestionnaire, un esprit entrepreneurial que l’hyper-administration historique de l’agriculture ne favorise pas. Comme le relève l’auteur, quand une crise se présente, le premier réflexe naturel des agriculteurs n’est pas d’adapter l’entreprise mais de se tourner vers les dirigeants de l’écosystème politico-administratif, protecteur. Ainsi, malgré les potentialités réelles de l’agriculture française, le monde agricole n’exprime qu’un « message quasi permanent de crise ». En guise de thérapie, Jean-Marie Séronie propose donc plusieurs voies pour que la « diva dépressive » retrouve confiance en elle. Ces chemins devront être empruntés par les agriculteurs eux-mêmes, chefs d’entreprise autonomes, capables de gérer leur trésorerie, d’oser les alliances et d’être flexibles en matière de production, mais les organisations professionnelles agricoles auront leur rôle à jouer. Leurs responsables devront « savoir anticiper, expliquer les évolutions au lieu de défendre presque systématiquement un existant dépassé ». L’auteur n’hésite pas à remettre en question certains fondamentaux, défendant par exemple la mise en place d’un salariat de qualité plutôt que l’installation systématique d’agriculteurs passionnés mais qui n’ont pas forcément la vision stratégique suffisante. Un livre qui risque de faire du bruit...

[1] Jean-Marie Séronie, L’agriculture française, une diva à réveiller ? Editions Quae, sept. 2014, 114 pages, 15 €