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Réforme de la Pac

Une étape majeure

Les 23 et 24 janvier, le Parlement européen a validé les orientations de la Commission européenne au sujet de la réforme de la Pac, en y apportant sa touche et en amendant nombre de points, se faisant en cela écho des inquiétudes de la profession. Passage en revue.
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La Commission agricole du Parlement européen (Comagri) a voté les 23 et 24 janvier le projet de la réforme de la Pac suite aux propositions de la Commission européenne. Qu’il s’agisse de la distribution des soutiens directs, du plafonnement des aides, du verdissement à 30 %, du soutien spécifique aux jeunes agriculteurs et du renforcement des organisations de producteurs, de la convergence des aides, les grandes lignes du texte ont été dans l’ensemble préservées. Néanmoins, un certain nombre d’assouplissements ont été introduits reprenant pour certains les propositions de la FNSEA.

OCM unique : toutes les propositions du rapporteur Michel Dantin portant sur l’OCM unique dans le cadre de la Pac ont été adoptées. Ainsi en est il des droits de plantation, dont le régime est actualisé et prolongé jusqu’en 2030. Pour le secteur du sucre, la prolongation des quotas jusqu’en 2020 a également été votée. Concernant le secteur du lait, les députés ont rejeté majoritairement le maintien des quotas laitiers. Ils ont soutenu le compromis conclu qui prévoit le renforcement des relations contractuelles dans le secteur laitier et des produits laitiers, comme proposé par le rapporteur ainsi que sur les mesures destinées à résoudre les déséquilibres graves sur le marché du lait.

Renforcement de la position de négociation des agriculteurs
: « en vue de permettre aux agriculteurs de mieux répondre à la volatilité du marché et de mieux gérer les crises, mais également de renforcer leur position lors de la négociation des prix, les organisations de producteurs devraient obtenir des pouvoirs largement plus étendus ainsi que de nouveaux outils », affirme la Comagri. Idem pour les organisations interprofessionnelles. La position de la Comagri élargit les missions des organisations de producteurs et des organisations interprofessionnelles, supprime la référence à la position dominante, réintègre les éléments sur les statuts et la reconnaissance des organisations de producteurs. Par ailleurs, la position adoptée reprend les mesures destinées à résoudre les déséquilibres graves sur le marché du lait et dans le secteur des fruits et légumes. « La logique de regroupement des exploitants agricoles ne doit pas aboutir à la constitution de cartels, mais doit leur permettre de sortir de la situation de dépendance économique et leur garantir des conditions de vie décentes », a déclaré Michel Dantin, rapporteur sur le règlement relatif à l'organisation commune des marchés.

Gestion des risques : les outils de gestion des risques devraient être financés par le budget alloué aux programmes de développement rural, et non par celui dédié aux paiements directs comme c'est le cas actuellement, ont déclaré les députés, qui ont soutenu la proposition de la Commission. Le compromis adopté sur la gestion des risques inclut les événements climatiques, tels que les inondations, et la possibilité d’une contribution financière payée directement à l’agriculteur pour le paiement des primes d’assurances pour couvrir les risques d’une baisse de revenu importante. Sur les assurances cultures, animaux et végétaux, le compromis adopté prévoit la possibilité de calculer exceptionnellement les pertes en prenant en compte des résultats d’une année spécifique au cours des cinq dernières années. Par ailleurs, sur les fonds de mutualisation, le compromis adopté intègre les phénomènes climatiques défavorables et les organismes nuisibles.

Verdissement : « de nouvelles règles sur la protection de l'environnement, selon lesquelles 30 % des budgets nationaux pour les paiements directs seraient subordonnés au respect de mesures écologiques obligatoires, doivent être plus souples », ont déclaré les députés. Les trois mesures principales, la diversification des cultures, le maintien de prairies et de pâturages permanents et la création de zones centrées sur l'écologie, seraient maintenues mais avec certaines exceptions, par exemple en vue de refléter la taille de l'exploitation. Les exploitations agricoles en dessous de 10 ha de terres arables devraient être exemptées et les règles devraient être assouplies pour les exploitations entre 10 et 30 ha, selon la Comagri. Les exploitations qui sont certifiées au titre de systèmes de certification environnementale nationaux ou régionaux, et qui, par conséquent, ont déjà recours à des pratiques favorables à l'environnement, seraient exemptes des mesures de "verdissement", à condition que les mesures qu'elles appliquent aient un impact au moins équivalent à celui des règles imposées.

Plafonnement des paiements directs
: les députés ont soutenu les propositions de la Commission européenne visant à plafonner les paiements directs versés à toute exploitation à 300.000 €. Le paiement serait réduit de 70 % pour les exploitations recevant de 250.000 à 300.000 €, de 40 % pour celles recevant de 200.000 à 250.000 € et de 20 % pour la tranche comprise entre 150.000 et 200.000 €.

Zones à handicap naturel : en ce qui concerne les paiements en faveur des zones soumises à des contraintes naturelles ou à des contraintes spécifiques, les députés ont adopté un compromis qui prend en compte les régions, les handicaps, le type de production et la structure économique de l’exploitation dans le calcul des coûts additionnels et des revenus. Pour ce qui est de la délimitation des zones soumises à des contraintes naturelles ou à des contraintes spécifiques, la Comagri stipule que les zones à contraintes naturelles peuvent être caractérisées par une faible productivité du sol ou de mauvaises conditions climatiques et par l’importance du maintien de la production agricole extensive pour la gestion de la terre. Ce compromis exige de la Commission qu’elle propose un règlement d’ici fin 2014 visant à rendre obligatoire les critères biophysiques et à définir les mises au point techniques.

Exclusions et convergences : en vue de garantir que les paiements directs sont alloués aux agriculteurs actifs uniquement, la Commission parlementaire a établi une liste d'entités, telles que les aéroports ou les clubs de sport, qui seraient automatiquement exclues du financement européen, à moins qu'elles prouvent que l'agriculture constitue une part importante de leurs revenus. Les États membres pourraient étendre ou adapter cette liste. Les députés ont également déclaré que les différences entre États membres concernant les niveaux de financement européen alloué aux agriculteurs devraient être réduites un peu plus rapidement que ce qu'a proposé la Commission européenne. Conformément aux nouvelles règles, aucun agriculteur de l'UE ne devrait recevoir moins de 65 % de la moyenne européenne. « La commission parlementaire a opté pour une redistribution plus solide de l'aide entre États membres, étant donné qu'il est difficile d'accepter des différences d'environ 300 euros par hectare entre agriculteurs dans divers États membres », a déclaré Manuel Capoulas Santos rapporteur sur les règlements relatifs aux paiements directs et au développement rural. Le taux des paiements aux agriculteurs dans chaque État membre pourrait également devenir uniforme d'ici 2019. Toutefois, en vue d'éviter des baisses soudaines et considérables du soutien, qui pourraient menacer la viabilité de nombreuses exploitations agricoles, les États membres seraient toujours autorisés à s'écarter de 20 %, au maximum, de la moyenne, ajoutent les députés. En outre, la proposition du ministre de l’Agriculture de « surprimer » les 50 premiers hectares dans la limite de 30 % de l’enveloppe nationale a été votée.

Renouvellement des générations : en ce qui concerne les priorités de l’Union pour le développement rural, le compromis adopté insiste sur la nécessité de faciliter l’entrée de nouveaux agriculteurs compétents, y compris dans le cadre du renouvellement générationnel. Il s’oriente vers un encouragement de la performance économique, de la participation au marché, de la diversification, de la modernisation et de la restructuration. Ce compromis encourage le maintien de l’agriculture productive dans les zones de montagne, les zones défavorisées et les régions ultrapériphériques.

Négociations à venir : la position de négociation de la Commission de l'agriculture doit recevoir l'approbation du Parlement dans son ensemble, avant que les députés puissent débuter les négociations avec les États membres sur la version finale de la future politique agricole commune. Pour l'instant, le vote en plénière est prévu pour la session de mars à Strasbourg, en attendant les chiffres finaux du cadre financier pluriannuel de l'UE pour 2014-2020 qui pourrait être adopté par le prochain sommet des chefs d'État et de gouvernement de l'Union, les 7-8 février.