Une vague de transmissions à bien gérer, anticipe Joffrey Beaudot, président de JA 71
Alors que le vote pour les futurs membres Chambre d’Agriculture à débuter, et se terminera le 31 janvier prochain, interview de Joffrey Beaudot, président de JA 71, qui revient sur les enjeux majeurs de ces élections.

Quelle est votre vision de l’agriculture d’hier, d’aujourd’hui et celle que vous portez pour demain ?
Joffrey Beaudot : Les modèles évoluent. L’agriculture d’hier et d’aujourd’hui sont différentes. Les attentes pour demain aussi. Mais les missions principales n’ont pas changé : occuper l’espace, nourrir les populations. Sauf qu’il y a aussi d’autres missions qui se sont ajoutées : préserver l’environnement, développer le tourisme… et demain, l’agriculture aura certainement une vocation pédagogique afin d’apprendre à une population déconnectée comment bien se reconnecter au cycle naturel des produits (fruits, légumes, élevage, céréales…). La saisonnalité va revenir avec le bien-être animal et l’environnement pour ramener de la logique dans nos sociétés de consommation. On ne pourra plus trop manger de tomates en décembre.
L’agriculture sera aussi demain beaucoup plus transversale, avec la production d’énergies renouvelables, la réalisation d’essais ou encore la création de liens humains.
Quels sont les attentes des agriculteurs du département ?
J.B. : La première des attentes est la reconnaissance économique, en valorisant et en ayant des produits vendus à leur juste valeur. La deuxième forme de reconnaissance viendra de la société qui doit se rendre compte que nous sommes utiles pour la biodiversité.
Les agriculteurs attendent de leurs responsables que la vérité soit faite, que l’agribashing cesse, en arrêtant de dire que les agriculteurs utilisent bêtement des produits sans réfléchir aux conséquences. Nous sommes des professionnels.
Quels sont les points forts du programme JA+FDSEA 71 ?
J.B. : c’est un programme qui est fait par des agriculteurs et des agricultrices. Il va au delà des problèmes économiques. Il se veut à l’écoute de chacun. Il doit permettre à tous de surmonter les étapes difficiles, notamment le mal être dans les exploitations. Il permet de mettre des mots sur les difficultés pour obtenir une aide collective. Car même si c’est la Chambre d’Agriculture qui communique sur ces dispositifs, ce sont en réalité pleins d’initiatives locales qui sont là pour aider et éviter tout passage à l’acte tragique. On peut aller mal mais il faut garder espoir avec du soutien.
Le programme économique fait valoir les savoir-faire locaux en soutenant les producteurs qui rayonnent déjà au-delà de nos frontières, ceux qui font la promotion de leur filière ou encore ceux qui s’impliquent dans la recherche de solutions pour trouver d’autres débouchés ou modes de valorisation. L’objectif étant de garder des filières fortes.
Agribashing, charges supplémentaires (phytosanitaires, redevance pollution diffuse…), comment inverser la tendance ?
J.B. : L’agriculture en Saône-et-Loire a toujours été dans des démarches constructives en dialoguant avec les pouvoirs publics et différentes organisations. Lorsqu’un problème surgit, une concertation commune se met en place pour co-construire plutôt qu’une loi bête et méchante. On dialogue avec tous pour aboutir à des chartes (zones humides, bonnes pratiques, des contrôles…). Pleins d’autres département les reprennent et même au national.
Après au niveau européen, c’est plus compliqué mais il faut rester acteur pour garder nos avantages pour être performants.
Enfin, pour que le changement des pratiques s’opère, il faut impliquer les agriculteurs au quotidien. C’est de leur seul volonté que les pratiques peuvent évoluer en bien ou en moins bien.
Quelles sont vos avancées syndicales marquantes ?
J.B. : Le dispositif installation et les aides ont évolué. Avec les taux d’emprunts faibles, les jeunes se détournaient des prêts bonifiés JA. Aujourd’hui, ils peuvent gérer leur DJA (dotation jeune agriculteur) comme bon leur semble. C’est une simplification et en Saône-et-Loire la moyenne passe de 18.000 € à 30.000 €. De quoi rendre le métier plus attractif et faciliter les installations.
On peut aussi se féliciter de voir que les jeunes soient aidés par la Pac (premier pilier) avec une revalorisation des DPB (droit à paiement de base) d’environ 70 euros par hectare, sur les 34 premiers hectares. Soit 2.500 euros par an durant les 5 premières années d’installation.
Enfin, même s’il reste du travail et que tout n’est pas encore calé, les EGAlim vont dans le bon sens. A nous, de terminer le travail.
Quels sont justement les dossiers qui restent à faire avancer dans le bon sens ?
J.B. : en Saône-et-Loire, la vague de départs à la retraite est un enjeu majeur. On a des productions traditionnelles et des demandes d’installation qui nécessite souvent des changements d’orientation de l’exploitation. Il va falloir concilier les deux en les accompagnant dans leurs envies techniques, principalement avec les conseillers Chambre d’Agriculture. Quitte à faire évoluer le projet en cours de route. Beaucoup de jeunes veulent faire de la vente directe : ce qui implique des connaissances en logistique, en contrôles qualité, sur l’exportation… la Chambre d’Agriculture peut les accompagner en posant une réflexion départementale collective pour aller plus vite, avec tout le monde.
Quel est l’enjeu majeur des élections chambre d’Agriculture 2019 ?
J.B. : le vote d’aujourd’hui est un droit. Le bafouer, c’est se résigner. La chambre d’Agriculture est un organisme incontournable en Saône-et-Loire. Donc, il faut choisir des représentants proches du terrain, avec des idées, qui connaissent les dossiers, les filières, les outils et l’histoire du département. La Chambre d’Agriculture va de l’installation à la retraite. Donc, c’est le moment de voter.