« Une volonté de reconnaissance »
l’appellation Lugny a fait la preuve de ses travaux et avancées
concernant le dépôt prochain de son dossier auprès de l’INAO : typicité
des vins issus de l’aire de l’appellation, études des sols et sous-sols,
élaboration d’un cahier des charges, notoriété commerciale historique
sont les quatre piliers en faveur de sa candidature pour obtenir le
titre d’AOC à (long) terme.
Le président du syndicat, Pascal Gaguin lisait d’ailleurs la préface du dossier synthétisé qui sera remis à l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) qui insiste sur « une volonté de reconnaissance ». Le sud Mâconnais est gâté avec ses appellations pouilly-fuissé, vinzelles et loché ainsi que saint-véran. Au nord Mâconnais, viré-clessé est pour l’heure la seule appellation communale. Lugny a pourtant « l’expérience et le savoir-faire qui a conduit à l’augmentation de la qualité de ses produits ». Pour les vignerons et les fidèles négociants, « c’est le moment de démontrer que nos terroirs peuvent atteindre un autre échelon dans la hiérarchie bourguignonne ». Pour cela, la communication –« maître mot de notre société »– sera prépondérante. Faut-il encore avoir des éléments à communiquer.
Pour cela, le syndicat a fait de longs travaux cette année. Tout d’abord en ce qui concerne la « mise en évidence de la typicité des vins » avec l’organisation de trois dégustations comparatives, expliquait le vice-président Thomas Rattez. L’œnologue du Vinipôle, Patrice Joseph présentait alors les caractéristiques des vins « Lugny » pour l’heure. Si leurs notes de dégustations sont supérieures aux vins alentours, ce sont surtout les notes aromatiques que Patrice Joseph recherchait : « muscat, floral, agrumes, fruits exotiques, épicé, miel… ». La nette « qualité » et « persistance en bouche », « l’intensité des arômes », la « complexité olfactive » ressortent de ses conclusions.
La finesse des paysages
Mais d’où viennent ces arômes et caractéristiques. Françoise Vannier-Petit se creusait la tête où plutôt le sol. La géologue a en effet arpenter les sols et les sous sols de l’appellation, n’hésitant pas à ouvrir sept profils (trous) géologiques. Si son étude caractérise « finement le paysage », elle révèle surtout les caractéristiques des sols permettant de croiser ces paramètres avec l’altitude, l’exposition, la pente… Entre les deux vallées de la future aire d’appellation probable, une certaine symétrie se dessine : des sols riches en calcaire surplombent des plateaux aux sols décarbonatés ; à l’ouest, les marnes (roche riche en argile) surgissent « surtout à mi-côteaux » avec des sols « encore carbonaté », soit la présence de calcaire actif. Cette géologie est « cohérente avec le chaînon central Mâconnais ». Les viticulteurs ont désormais à leur disposition un vocable, un argumentaire. « Le terroir n’est pas que le sol et ses sous-sols mais c’est aussi le paysage et les gens qui le travaillent ». Dès lors, chaque faciès, roche, cailloux devient une histoire.
Une richesse de lieux-dits à découvrir
Ça, Emmanuel Nonain en est convaincu. "Historien", il inscrivait la démarche de cette revendication d’AOC dans les sillons d’Eugène Blanc (1876-1964), d’Alphonse Grosbon (1902-1996) et d’Henry Boulay (1889-1942). Lugny étant marqué par sa coopérative. Mondialement connus, mâcon-lugny « Les Charmes » et « Les Genièvres » sont déjà des « macro lieux-dits » de renom. Mais beaucoup d’autres existent, « témoignant de la richesse » de l’appellation. Un enchevêtrement « impressionnant » de lieux-dits reste à faire découvrir. Autant dire que les Climats de Bourgogne n’ont pas fini de s’enrichir au fil des recherches.
Invitant chacun à continuer à « préciser ce lien à l’origine », Alain Fraty de l’INAO à Mâcon, se voulait « positif » sur l’aboutissement de la demande d’AOC mais à échéance « entre cinq et dix ans ». Pour les prochaines générations de viticulteurs donc…
Une rivière de bons vins lugny
Etymologiquement, Lugny vient d’un mot celte signifiant "rivière". Il est aussi le patronyme d’une noble famille. « Le blason n’est pas du marketing ». Le nom Lugny est –dès 1948– inscrit sur une étiquette et en 1961 déjà, ces vins sont présents dans les restaurants. Le négoce est un partenaire essentiel depuis les années 1970, permettant de conquérir des marchés outre-Atlantique. Actuellement, vingt cuvées sont identifiées, dont cinq lieux-dits. La fourchette de prix varie de 5,53 € à 14 € TTC la bouteille de 0,75cl.
L’empreinte de la coopération
Stéphanie Jacquelin détaillait la proposition de cahier des charges. L’appellation sera réservée aux seuls vins blancs issus du cépage chardonnay. La densité minimale sera de 7.000 pieds/ha. Les règles de taille sont inchangées avec l’appellation régionale mâcon. La charge maximale à la parcelle étant fixée à 10.500 Kg/ha. Le rendement (et butoir) sera de 64 hl/ha avec un rendement butoir à 70 hl/ha pour le mâcon-lugny. Seuil fixé à 62 hl/ha pour les vins précisant une plus petite unité géographique, avec un butoir à 68 hl/ha. En cas de plantation ou replantation, le syndicat incite à remettre des clones "muscatés". 15 % de l’aire de l’appellation délimitée pour l’instant reste à planter.
Le vignoble est marqué par le système coopératif (627 ha). 17 caves particulières produisent sur 25 ha mais seules neuf d’entre-elles produisent du mâcon-lugny.