Vers l’asiatisation des vins ?
Bourgogne, VinoMarket et VinoSciences, les 3 et 4 novembre à Beaune, le
BIVB a fait le point sur les marchés et les dernières solutions
proposées à la filière. Après l'Européanisation, après l'Américanisation, est-ce le tour de l'Asiatisation des vins de Bourgogne ?
En revanche, la grande distribution est en augmentation sur 12 mois flottants (+ 3 % en volume et + 4,5 % en valeur). La valorisation du Crémant de bourgogne suit la même tendance que les vins tranquilles (+ 2 % en valeur) sans pour autant voir les ventes diminuer. Circuit non négligeable dans certaines communes bourguignonnes, les ventes directes –via l’œnotourisme– « semblent correctes » (28 millions de cols). 65 % des entreprises vendant en bouteilles vont à la rencontre des clients sur les marchés ou salons, ainsi que sur le Web (25 %).
Coteaux bourguignons 2011
Célébrons également, la naissance des Coteaux bourguignons puisque le cahier des charges a été voté par l’INAO, il y a deux semaines. « Une bonne chose car ils ont permis de réunir la Grande Bourgogne, avec nos cousins du Beaujolais, qui ne vont toujours pas bien ». Le millésime 2011 sera donc le premier pour cette appellation, enterrant le Bourgogne Grand Ordinaire. Autre dossier commun avec le Beaujolais, la production de Bourgogne blanc en Beaujolais. La délimitation des 42 communes, ayant la possibilité de produire du Bourgogne blanc, est définie. Maintenant, « individuellement, chaque terroir devra être délimité et sera contrôlé ». En effet, « il n’est pas question de déséquilibrer ce marché », insistait Pierre-Henri Gagey, président-délégué. La Bourgogne a en face d'elle, « des gens raisonnables du côté des beaujolais », rajoutait-il, avant de rendre hommage également « à l’INAO qui a bossé rapidement », sentant là, un « vrai problème ».
Amérique du Nord confortée
Côté export, pour l’exercice 2010, les vins de Bourgogne ont réalisé une « très bonne performance » avec un chiffre d’affaires en augmentation de + 13,5 % en volume et + 16 % en valeur. « Précision utile cependant, le volume est stable en millésime 2010. Ce qui veut dire que nos prix ont monté grâce à un millésime 2009 très attendu par les clients, surtout après 2007 et 2008, où on avait été obligé de baisser nos prix », précise le négociant. Sur les sept premiers mois 2011, le chiffre d’affaires à l’export est en hausse de 17%. « La Bourgogne retrouve donc ses sommets ».
Fait notable en 2010, les États-Unis deviennent le premier marché des vins de Bourgogne, avec + 25 % en volume et + 40% en valeur, devançant le Royaume-Uni (- 16 % en volume ; - 8 % en valeur). Le Canada devient un marché « sérieux », avec un dollar canadien "fort". Ce pays monte sur la 4e marche.
L’Asie progresse
Le Japon reste en tête des pays de la zone Asie (+ 14 % en valeur ; + 4 % en volume). « C’est une surprise après les catastrophes ». Ensemble, Hong Kong (+ 49 % en volume ; + 108 % en valeur) et la Chine réalisent la plus forte progression (bientôt 6e marché). Réexportant « sans taxe », Hong Kong devient une plaque tournante pour approvisionner tous les marchés asiatiques. Singapour et Taiwan progressent également de façon « non négligeable ».
Alors que la Chine est le premier marché des Bordelais, le négociant beaunois estime que « ce n’est pas un eldorado. Même si on est tenté, il faut progresser par étapes. Car une montée trop rapide risquerait de déstabiliser nos autres marchés ». Pourtant, tous les signes indiquent que les Chinois vont durablement tirer le marché mondial et sont prêts à mettre « des sommes élevées » sur des appellations de Bourgogne. Il y aura donc forcément "la prime aux leaders".
L’Interprofession va donc envoyer un permanent (VIE) afin de « mieux comprendre le marché chinois et former des prescripteurs » (voir en page 17). Il devra également surveiller certains circuits vendant des contrefaçons.
L’Europe régresse, d’autres promettent
« L’Europe, c’est moins drôle », résume Pierre-Henri Gagey. L’Allemagne (- 22 % en volume ; + 13 % en valeur), les Pays-Bas (+ 2 % en volume ; + 4 % en valeur), le Danemark (- 13 % en volume ; - 3 % en valeur). Seule, la Suisse (5e marché) résiste en valeur (- 3 % en volume ;+ 37 % valeur). Le 6e marché, la Belgique fait - 14 % en volume et – 13 % en valeur.
Enfin, des marchés prometteurs (Australie, Brésil, Émirats Arabes Unis…) « vont compter dans l’avenir ». Ils ne représentent pour l’heure que 2 % du chiffre d’affaires de la Bourgogne en valeur. Elle est par contre en position dominante, réalisant 30 % des exportations en valeur des vins tranquilles AOC français sur le marché australien ou brésilien.
Progrès techniques : basé sur un tryptique durable
"Durable", un mot à la mode qui dans le Plan Bourgogne Amplitude 2015 prend une autre dimension. Préservation de l’environnement évidemment mais en conciliant économie et social. Le BIVB entend mettre les moyens pour atteindre en 2015 l’objectif de faire des vins de Bourgogne « La référence mondiale des vins issus de la viticulture durable » et pour cela, les différents pôles de l’Interprofession vont s’évertuer à faire "progresser" les pratiques viticoles et œnologiques. Un cabinet conseil travaille également sur les aspects commerciaux et rendra ses conclusions en janvier. Directeur du pôle technique & qualité au BIVB, Jean-Philippe Gervais apportait des précisions utiles. Des actions terrains sont lancées comme « sur Gevrey, à travers la réalisation d’un diagnostic environnemental » dans le but de raisonner l’utilisation des phytosanitaires. A priori, les premiers résultats montrent que les pratiques ne diffèreraient que peu au sein d’un même domaine, sur des parcelles classées en cru ou non. La filière bourguignonne vient d’intégrer un projet européen (BioDivine) visant à diversifier la biodiversité justement, « pour mieux réguler la faune et les ravageurs », toujours dans un but environnemental mais surtout de « pérennité du territoire et de la production ».
Une recherche fondamentale qui servira à être appliquée. Des outils d’aides à la décision viennent d’ailleurs d’être mis à la disposition des professionnels. Accessibles depuis les Smartphones (Androïd et iOS), les vinificateurs pourront par exemple calculer les quantités de SO2 moléculaire, la fraction active protégeant les vins des défauts (brett’s, GMT…). Le calcul précis des volumes de saccharose pour enrichir les vins sera également possible. Enfin, dernier calculateur disponible, la surface du couvert végétal et l’ombre portée, afin d’aider les viticulteurs à « optimiser le rognage ». Toutes ces nouveautés et bien d’autres seront présentées plus largement, les 3 et 4 novembre prochain, lors de VinoSciences et VinoMarket au Palais des Congrès de Beaune. « Ce sera un lieu d’échanges entre professionnels et chercheurs pour toute la filière afin de faire émerger des idées nouvelles et fortes ».