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Victor-Emmanuel Pacaud à Lugny-les-Charolles

Victor-Emmanuel Pacaud pratique le pâturage tournant pour ne plus gâcher d’herbe !

Sur son exploitation aux confins du Charolais et du Brionnais, Victor-Emmanuel Pacaud pratique le pâturage tournant pour la totalité de ses bovins. Cette conduite herbagère lui permet de ne plus gâcher d’herbe tout en ayant des prairies plus propres.

Par Marc Labille
Victor-Emmanuel Pacaud pratique le pâturage tournant pour ne plus gâcher d’herbe !
Victor-Emmanuel Pacaud a commencé à pratiquer le pâturage tournant en 2009-2010 en cherchant à se débarrasser de refus.

Victor-Emmanuel Pacaud est à la tête d’une exploitation toute en herbe de 115 hectares sur laquelle il fait vêler 65 charolaises. Après avoir été durant neuf ans salarié d’une coopérative agricole, il a repris l’exploitation de ses parents à Lugny-lès-Charolles en 2009. Victor-Emmanuel a pris le parti de faire vêler ses vaches seulement à partir de fin janvier : l’essentiel des vêlages a lieu entre le 1er février et le 15 avril. Cette pratique permet de rentrer le cheptel plus tard dans la saison (en décembre) et donc « d’avoir des animaux le minimum de temps à l’étable », fait valoir l’éleveur. Cela nécessite moins de place en bâtiment, moins de stock fourrager, moins de paille, ce qui génère beaucoup d’économies, fait-il valoir.
Victor-Emmanuel aime bien commercialiser ses broutards avant l’hiver. Ceux qui naissent avant le 15 mars reçoivent un aliment au nourrisseur à partir de l’été pour une vente en fin d’année. L’an dernier, à cause de l’excès de pluies, les broutards n’ont pas été soignés au pré, mais ils ont été alourdis dans l’hiver en bâtiment. Quant aux mâles nés après le 15 mars, ils sont relâchés au printemps pour une commercialisation en taurillons d’herbe. Les femelles sont engraissées au pré pour une vente à trois ans et les vaches de réformes sont également vendues grasses pour l’essentiel.


Pâturage tournant « par accident »


Sur son exploitation typiquement herbagère, Victor-Emmanuel pratique le pâturage tournant depuis 2009-2010. « Un peu par accident », révèle-t-il. C’est en effet en voulant lutter contre des refus dans des prairies d’embouche que le jeune éleveur a commencé à cloisonner des parcelles. « Mon père fauchait chaque année ces refus après les foins. Moi, j’ai voulu clôturer ces zones pour les faucher plus tôt. Puis j’ai laissé les clôtures pour les faire manger », explique Victor-Emmanuel. Les bovins se sont ainsi mis à tourner sur deux, puis trois, puis quatre et même cinq paddocks subdivisant un même îlot. Depuis trois ans, l’éleveur pratique le pâturage tournant sur l’intégralité de son exploitation.


Étendu à tous les types d’animaux


La ferme compte ainsi quatre îlots recevant chacun un lot d’animaux en pâturage tournant. D’autres lots tournent également « temporairement » sur des parcelles de fauche. Sont ainsi conduits en pâturage tournant : trois lots de vaches suitées avec taureau, un lot de génisses de 2 ans avec taureau, un lot de génisses d’un an, un autre lot de génisses, un ou deux lots de bêtes à l’engraissement et un lot de mâles.
Le pâturage tournant s’est déployé sur l’exploitation en même temps que Victor-Emmanuel installait des clôtures électriques : « pour cloisonner des parties de pré, pour faire du stock ». L’éleveur s’est en effet donné comme objectif de constituer un hiver de stock fourrager d’avance.
Pour l’abreuvement des animaux, la plupart des parcelles donnent sur un cours d’eau et dans les autres cas, l’éleveur a aménagé un couloir reliant chaque paddock au point d’eau. Il lui arrive aussi de découper certaines parcelles en « camembert ».


Ajuster en permanence


Pour la conduite quotidienne du pâturage, les lots de bovins changent de paddocks tous les sept jours maximum. Lorsque la pousse de l’herbe est trop importante et qu’il y a « trop d’avance » dans les paddocks, Victor-Emmanuel ajuste en remettant des bovins supplémentaires dans le lot ou bien il recloisonne la parcelle. Une autre option consiste à faire tourner les animaux plus vite, quitte à laisser une herbe un peu plus haute, « en laissant du stock sous pied », explique-t-il. Enfin, l’éleveur peut encore mettre de côté un paddock pour le faucher plus tard ou le garder en stock sur pied pour nourrir les bêtes en été. C’est un pilotage permanent que Victor-Emmanuel dit effectuer « au pif », mais « à flux tendu », ce qui nécessite une réactivité de tous les instants. « Il faut avoir peur de manquer d’herbe tout le temps pour y arriver », résume l’éleveur.


Les chardons ont disparu


Le premier bénéfice du pâturage tournant est de « ne plus gâcher d’herbe », fait valoir Victor-Emmanuel. Les chardons qui salissaient les prés d’embouche ont disparu de l’exploitation. Plus besoin de broyeur de refus. Les prés sont propres ; de vrais « tapis d’herbe ». L’éleveur apprécie également le gain de temps pour faire le tour des animaux. En pâturage tournant, les lots de bovins sont plus importants et donc moins nombreux. Les animaux sont aussi plus faciles à manipuler. Habitués à être changés de pré toutes les semaines, ils suivent facilement l’éleveur.
Dernier bénéfice : le pâturage tournant a permis à Victor-Emmanuel de « refaire des stocks de fourrages ».


Taurillons d’herbe sans aliment


L’impact du pâturage tournant sur la production des animaux est encore difficile à évaluer. Victor-Emmanuel a constaté que cette conduite convenait bien aux mâles nés après le 15 mars. Ces taurillons d’herbe peuvent en effet se passer d’aliment pour une vente avant l’été. Le constat est plus mitigé pour les broutards sous leurs mères. La présence de nourrisseurs masque l’effet du pâturage sur la croissance des veaux et sans aliment, les mâles risqueraient d’être moins lourds à la vente, estime l’éleveur.
L’engraissement des femelles rien qu’à l’herbe est moins évident, poursuit-il. Les réformes reçoivent toujours une complémentation à la fin du cycle de finition. Plus les bêtes sont conformées, plus leur engraissement est difficile et long sans aliment, ajoute-t-il. Et l’engraissement s’interrompt dès que la chaleur estivale dégrade la pousse et la qualité de l’herbe. Il peut reprendre avec le retour de l’herbe en automne.

 

Support de l’Observatoire National de la Pousse de l’Herbe

Support de l’Observatoire National de la Pousse de l’Herbe

L’exploitation de Victor-Emmanuel Pacaud est l’une des onze fermes de Saône-et-Loire servant de support à l’Observatoire National de la Pousse de l’Herbe (ONPH). Chaque semaine, du 1er février jusqu’au 31 octobre, une technicienne de la Chambre d’agriculture vient réaliser des mesures de la pousse de l’herbe à l’aide d’un herbomètre connecté. Ces mesures sont effectuées sur trois îlots recevant des animaux en pâturage tournant.

Foin et enrubannage au menu

Chaque année, Victor-Emmanuel Pacaud récolte du foin et de l’enrubannage de prairies naturelles. Les données météo plus précises lui permettent de faucher plus précocement dans la saison. La récolte en enrubannage génère des stocks qui ne nécessitent pas de bâtiment et le fourrage fournit de la protéine meilleur marché que de l’aliment, fait valoir l’éleveur.