Régions de France
Les revendications de Régions de France pour la future Pac

Publié par Cédric Michelin
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Si sa pérennité est essentielle, la Politique agricole commune telle qu’elle est aujourd’hui « est déficiente », estiment les Régions de France. Face à ce constat, elles proposent une Pac simplifiée et modernisée qui innove notamment sur deux points : la rémunération des services non marchands et un renversement de la logique d’obligation de moyens, pour passer à un système d’obligation de résultat.

Les revendications de Régions de France pour la future Pac

« Insuffisante résilience des exploitations face aux crises de diverses natures, inégale répartition de la valeur au sein des filières […], résultats insuffisants en termes d’amélioration des impacts environnementaux »… Les conséquences des défaillances de la Pac sont nombreuses, affirment les Régions de France dans leur contribution à la consultation publique de la Commission européenne pour la future Pac. Dans ce contexte, il apparaît indispensable à l’organisation de réformer la Pac, afin de tendre vers un modèle plus simple, qui légitimerait les aides « aux yeux de ses bénéficiaires comme de l’ensemble des citoyens européens ».

Des propositions communes à celles de la profession agricole

Régions de France propose des aménagements dans la veine de ceux défendus par la majorité des organisations agricoles. « On n’invente pas ! On travaille avec les organisations agricoles », explique Jean-Pierre Raynaud, président de la commission Agriculture, alimentation et forêt chez Régions de France. Ainsi, dans sa contribution, Région de France plaide notamment pour le développement de « dispositifs contracycliques » pour adapter le niveau des aides à la volatilité des cours et le déploiement du système assurantiel, sans pour autant rendre l’assurance obligatoire. « Une assurance plus incitative, tant au niveau de sa franchise que de son prix à l’hectare, n’aura pas besoin d’être obligatoire », estime Jean-Pierre Raynaud. Pour ce faire cependant, « il faut mettre plus d’argent sur la gestion des risques », affirme Régions de France, qui défend une Pac dont le budget soit maintenu « au minimum » à son niveau actuel. À niveau constant, il faudra alors faire des arbitrages, pour pouvoir flécher des moyens vers l’aide à l’assurance.

Des bonus pour les services environnementaux et sociétaux

Régions de France propose une Pac qui reconnaisse « la double vocation de production alimentaire et de biens communs ». Les agriculteurs recevraient une « aide de base » qui serait perçue dès lors que l’agriculteur respecte les « standards européens du point de vue qualitatif et sanitaire ». À ce « socle commun », comme l’appelle Jean-Pierre Raynaud, pourraient se rajouter différentes « briques » qui seraient des bonifications venant encourager des pratiques plus vertueuses, au niveau environnemental et social. Il s’agirait là, paradoxalement, de rémunérer par le biais de bonifications, ce que Région de France appelle des « services non marchands ».

Obligation de résultat

Dans le but de simplifier la Pac et de « donner plus d’autonomie à l’agriculteur » dans ses choix, Régions de France suggère de mettre fin au système d’obligation de moyen qui conditionne les aides, et de passer à une obligation de résultat. « L’obligation de moyen entraîne une multiplication des normes et des charges administratives », constate Jean-Pierre Raynaud. « Il est d’ailleurs plus simple de mesurer les résultats », poursuit-il. Le principe d’obligation de résultat paraît plus vertueux dans le sens où il favorise l’innovation et responsabilise : les agriculteurs eux-mêmes quant à leurs pratiques, mais aussi les élus, fait remarquer Régions de France. Car eux aussi, notamment au niveau local, revendiquent la possibilité de faire des expérimentations en matière de politiques publiques, afin d’actionner les leviers les plus opportuns en fonction des spécificités des territoires.

Une co-gouvernance État - Régions

Reste que l’étendue du rôle des élus, notamment régionaux, ne dépend pas uniquement des décisions de l’Europe. Les régions de France l’ont déjà appris à leurs dépens. Alors qu’elles gèrent désormais la quasi-totalité du Feader, soit 10,8 milliards d’euros sur la période 2014-2020, les régions constatent que l’intervention de l’État dans ce domaine freine leur propre action. Elles avaient d’ailleurs fait part aux candidats à la présidentielle de la nécessité de leur transférer « la totalité des moyens financiers et humains correspondant aux crédits de la Pac », (deuxième pilier, Ndlr). Et en réponse à ceux qui craignent que ce transfert budgétaire soit source d’inégalités entre les régions, Région de France rappelle l’existence du Conseil supérieur d’orientation (CSO), qui fixe les grands axes nationaux de la politique agricole, et de fait, assure une cohérence nationale des politiques territoriales. « Il faudra cependant rénover le CSO pour qu’il devienne une instance de gouvernance coprésidée par l’État et les régions » affirme Jean-Pierre Raynaud. Les négociations sur le sujet ne se joueront pas à Bruxelles, mais rue de Varennes, ou même à l’Elysée.