EXCLU WEB / Agriculture régénératrice : plus de questions que de réponses

Cédric MICHELIN
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Le think-tank Agridées organisait récemment un colloque sur le thème : « L’agriculture régénératrice : concept marketing ou changement de paradigme ? ». Comme à l’accoutumée, les réponses ne sont pas aussi tranchées. Sans doute une question de définition même si le paradigme, un brin teinté de marketing, reste le même : s’adapter. 

EXCLU  WEB / Agriculture régénératrice : plus de questions que de réponses

Qu’appelle-t-on réellement par agriculture régénératrice ? « Produire plus avec moins », selon la définition raccourcie de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ? « Nourrir durablement la planète » ou « aller vers une agriculture à haute performance globale », selon le conseiller scientifique Michel Dubois d’UniLaSalle ?

En fait, le vrai point commun à ces définitions recoupe l’objectif de conserver les propriétés des sols sur la base du triptyque suivant : avoir un sol couvert, réaliser des semis sans travail, et diversifier les cultures. Pour avoir expérimenté cette pratique culturale sur son exploitation de 115 ha, Diane Masure, du réseau de l’Association pour la promotion d’une agriculture durable (APAD) reste positive et partagée. « Je parviens à obtenir des rendements équivalents à mes voisins qui sont en conventionnel, grâce à l’apport de matière organique, à une réduction des intrants… Mais le semis direct ne fonctionne pas sur le chanvre », explique-t-elle. Sur le même itinéraire cultural, Sébastien Roumegoux, agronome de Biosphère, souligne que la transition d’un modèle conventionnel à un modèle d’agriculture de conservation des sols (ACS) prend « bien quatre à six ans avec des feuilles de route de plus long terme : entre 10 et 15 ans ». En fait, la vraie différence entre l’agriculture de conservation des sols et l’agriculture régénératrice tient dans l’utilisation de produits de protection des cultures. « Je ne me l’interdis pas quand c’est nécessaire », justifie Diane Masure. Elle regrette que « quoique les agriculteurs fassent, ce ne sera jamais bien car ils n’en font jamais assez » mais aussi que l’aval, en particulier la grande distribution ne reconnaisse pas les efforts réalisés par les agriculteurs pour répondre aux attentes de la société et du consommateur.

« Du bon sens »

Reste que dans le maquis des labels et appellations, « pas un seul ne vient entériner l’agriculture du vivant, comme l’ACS ou l’agriculture régénératrice », explique Anne Trombini, directrice de « Pour une agriculture du vivant ». Ces efforts méritent naturellement d’être rémunérés. Mais à quelle hauteur ? Par quel biais ? « Car les agriculteurs réalisent des investissements et prennent des risques », remarque Henri Biès-Péré, 2e vice-président de la FNSEA. Adrienne de Malleray, de la start-up Genesis, milite pour les efforts de cette transition à travers son GenesisScore qui s’appuie sur l’analyse de sols, avant, pendant et après cette transition. « Nous sommes là pour valider, certifier scientifiquement un impact, pas pour donner des conseils », précise-t-elle. D’ailleurs, à terme, les entreprises agroalimentaires auront l’obligation de communiquer sur leur impact et donc de « remonter jusqu’à l’agriculture ». D’où l’idée de s’appuyer sur le PlanetScore, propose Anne Trombini pour qui ce sigle pourrait permettre d’arbitrer sur des critères lisibles. Finalement, il revient « à chaque agriculteur d’adapter son chemin en agriculture de conservation des sols », résume Diane Masure suivie en ce sens par Sébastien Roumegoux qui plaide pour « alimenter le cycle du vivant » et de « faire une agronomie de bon sens ».