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Coopérative de production avicole de Saône-et-Loire

Garder le bon équilibre de la filière

Le 20 mars à la ferme de Jalogny, la coopérative de production avicole de Saône-et-Loire (CPASL) tenait son assemblée générale. Le mot d’ordre était inchangé : la filière avicole doit rester unie, partager équitablement la valeur produite.

Par Cédric Michelin
Garder le bon équilibre de la filière

Ce n’étaient pas des mots de remerciement sans conviction que prononçait d’emblée le président de la CPASL, Patrice Labrosse : « Je tiens à remercier tous les acteurs de la filière », lançait-il sincèrement en direction de la cinquantaine d’éleveurs présents déjà. Et de lister et citer ensuite les présents dans la salle, un par un, en signe d’une filière soudée. Il commençait par les constructeurs, les couvoirs, Vitogaz « partenaire exclusif » de la CPASL pour le chauffage des bâtiments, les fournisseurs d’alimentation, les vétérinaires, les laboratoires… ainsi que les organisations professionnelles agricoles et la DDPP, « avec qui nous travaillons de concert », y compris avec les voisins du Gad (groupement des aviculteurs) des Dombes qui ont « la même structure indépendante que nous ». Évidemment, il gardait pour la fin les partenaires bancaires pour les financements et les abattoirs, Palmid’or évidemment, pour le « bon fonctionnement » avec Ronsard et le groupe LDC. Patrice Labrosse espère et plaide pour que les « bonnes relations », qu’il répétait, perdurent ainsi en Saône-et-Loire.

Des bâtiments mixtes

Après cette courte introduction, la directrice de la CPASL, Martine Début passait au rapport d’activité d’un exercice encore bien chargé pour la coopérative et ses 41 exploitations adhérentes. Sur l’exercice 2023-2024 clôturé, 2.279.334 ventes ont été réalisées auprès des différents abattoirs, majoritairement en canard « à rôtir » de Barbarie (61 %), suivis par les poulets « à croissance lente » JA (27 %) et enfin en poulets « du quotidien » Ross (12 %). Un total légèrement en baisse (-3.7 %) s’expliquant par le développement l’an dernier de bâtiments « mixtes » du côté des éleveurs, permettant de faire soit des poulets Ross « en forte hausse » ou des canards « en baisse » donc. « Le marché canard a été moins porteur », expliquait la directrice. Idem pour les poulets JA qui ont été moins recherchés par les consommateurs, faisant baisser les volumes de vente et les poids. Martine Début remettait cependant en perspective les dix derniers exercices « en croissance jusqu’en 2021 ». Depuis, la tendance s’est inversée « globalement », du côté des ventes de canards donc, mais aussi au sein de la CPASL en raison de « départs en retraite ». La coopérative cherche donc des repreneurs ou de nouveaux installés, elle qui propose des aides aux jeunes adhérents. La CPASL a plusieurs types de production en canards, soit sur caillebotis (37 %), soit sur litières (36 % avec des poulets), soit avec un jardin d’hiver (17 %). Les bâtiments mixtes représentent désormais 10 % et permettent surtout « d’ajuster » la production aux tendances des marchés.

Performances en hausse

Après ce volet général, les techniciennes, Élodie Wozniak et Johanna Condoluci détaillaient les résultats technico-économiques. En canards et canettes, les « performances sont en amélioration », tant à la journée d’élevage qu’au GMQ, même si ces gains sont un « peu moins marqués sur litière » mais restant positifs. « Le sexe ratio a évolué aussi l’an dernier avec plus de mâles, ce qui explique aussi certains écarts », notait Élodie Wozniak. Patrice Labrosse rajoutait que le conseil d’administration suit de près le rapport « qualité-prix » des litières qui restent les « meilleurs produits » pour les canards et qui sont « intégrés dans les coûts de production et prix de reprise », faisant dès lors évoluer les grilles et les marges. En poulets Ross ou JA, les poids et GMQ restent « stables et cohérents avec les âges » de départ des poulets, indiquait Johanna Condoluci. Néanmoins, en Ross, l’arrêt des antibiotiques a « augmenté la mortalité », ce qui a baissé la marge moyenne ou au sujet, et donc la CPASL va revoir sa grille et faire des compléments de revenus à ses adhérents.

Le sans-antibio plutôt que sans-OGM

Le sanitaire reste plus que jamais au cœur des préoccupations des aviculteurs, et pas qu’en raison des risques d’influenza aviaire ou de grippe aviaire transmissible. Un large point technique était fait sur les questions de mortalité à 10 jours et sur les salmonelles. Avec toujours en toile de fond, l’usage ou plutôt le retrait des antibiotiques. Le président de la CPASL donnait justement la parole aux abattoirs pour qu’ils fassent un retour aux éleveurs. Premier à témoigner, Christophe Morel pour Palmid’Or. « Le marketing a retenu le sans-antibio pour Le Gaulois (plutôt que le sans-OGM) pour ne pas être pénalisé par certains clients », lui qui constate que la pression salmonelle est « maîtrisée » dans son abattoir avec des nettoyages-désinfections « renforcés ». Le site est donc indemne tout comme chez LDC. Luc Olivier précisait toutefois que « les abats ne peuvent pas être récupérés » sur ces lots, malgré une forte demande des marchés. Le responsable du secteur chez LDC faisait un aparté sur « les abats casher nécessitant un rabbin en permanence sur site » qui vérifie notamment l’inflammation ou non des tendons qui dans la religion juive sont un signe de bonne ou mauvaise santé du poulet. Trois pathogènes sont en cause dont un réovirus. Des déclassements ont parfois lieu, enlevant de la valorisation. LDC précisait enfin « travailler sur le zéro report » donc tenir « fidèlement » les ramasses à « 34-35 jours ».

Des démarches qualités en progrès

Martine Début rappelait accompagner les adhérents dans leur gestion des plannings, et pas que, jusqu’à la réalisation des bilans de rémunération des éleveurs. La CPASL n’a que des démarches qualité (avec cahier des charges) de type EVA, pour de bonnes pratiques d’élevage permettant d’estampiller les produits avec le logo Volaille Française. Elle citait les « belles avancées » de Nature d’éleveurs de LDC qui a permis de passer de 17 à 23 bâtiments. « Tous ces audits ont toutefois un coût » pour la coopérative, qu’elle chiffre à 19.500 €, ramenés à la tonne produite revient à 4€/t. « Sans compter les investissements des éleveurs pour des fenêtres, des éclairages naturels et beaucoup d’organisation », est bien consciente la directrice.

Une grille Feader excluante

Ce qui malheureusement ne semble toujours pas être le cas du Conseil Régional de Bourgogne-Franche-Comté qui reste « sourd » aux besoins des éleveurs voulant s’installer ou moderniser leurs bâtiments, avec des fonds Feader inaccessibles presque. La CPASL voit bien la différence de gestion avec la région Aura voisine, notamment dans l’Ain. « Le Corel est notre interlocuteur avec la Région BFC pour rendre accessible la grille de sélection et défendre les éleveurs. On monte des dossiers, on a besoin de ces aides pour faire évoluer nos bâtiments. On tiendra bon », se bat Martine Debut. Patrice Labrosse pouvait donc conclure, après l’intervention d’Agr’Idées (lire notre prochaine édition), sur « la nécessité de faire évoluer nos tarifs qui se font en filière, car nous sommes liés les uns aux autres », alors que les coûts de production ont fortement augmenté ces dernières années. Une compétitivité qui n’est pas tant franco-française, mais bien en raison de la compétition de produits massivement importés aux conditions d’élevage moindre. « Tout le monde doit préserver la filière, sans place à des fourberies. On doit faire des choix pour gagner tous ensemble », concluait le président.

Tribune

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