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Politique agricole américaine

Le Farm Bill sur le point d’être adopté

La nouvelle loi américaine pour la période 2012-2017 devrait être
adoptée d’ici la fin de l’année. A moins que le Farm Bill actuel soit
prorogé d’un an, en raison des élections présidentielles. Quoi qu’il en
soit le texte final devrait permettre aux farmers américains de choisir
entre un système d’assurance récolte et les déficiency payments.
Par Publié par Cédric Michelin
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La Commission de l’Agriculture de la Chambre des représentants, à majorité républicaine, a adopté à la mi-juillet, le projet de Farm Bill, la nouvelle loi de politique agricole américaine pour la période 2012-2017. Le Sénat à majorité démocrate avait adopté, quelques semaines plus tôt, le 21 juin, son projet. Le Sénat avait profondément innové en supprimant les aides directes versées aux agriculteurs américains et notamment les aides découplées, celles qui ne dépendent pas du niveau de production. Dans le texte sénatorial, la priorité est donnée aux mécanismes d’assurance qui permettent aux producteurs d’être indemnisés lorsque les prix de marché ou les rendements sont mauvais. Concrètement, le nouveau système permettrait à un exploitant de bénéficier d’indemnités complémentaires permettant de couvrir le risque résiduel non couvert par les assurances classiques. Alors que les assurances classiques couvrent 75 % des risques, le programme d’assurance perte de recettes permettrait d’atteindre 89 %, 11 % restant à la charge du farmer. L’adoption par le Sénat du tout assurance a été vivement critiquée par les producteurs du Sud, notamment de riz, d’arachide et de coton, le considérant comme inéquitable. Alors que ce système est largement perçu comme favorable aux producteurs de maïs et de soja. Un argument repris par la Commission agricole de la Chambre des Représentants. Qui considère également que le programme d’assurance perte de recettes ne protège pas les agriculteurs contre une baisse durable des prix. Le texte qu’elle a adopté diffère assez sensiblement du projet voté par le Sénat en ce sens qu’il rétablit les prix objectifs (target prices) et les paiements compensatoires (déficiency payments) comme une alternative au programme d’assurance perte de recettes. Sans renoncer aux mécanismes d’assurance.


Recouplage




Pour la Chambre des Représentants, chaque producteur doit avoir le choix du programme qui lui convient pour chacune de ses productions, déficiency payment pour le riz, assurance chiffre d’affaires pour le maïs par exemple. Mais l’option doit être effectuée pour la durée du Farm Bill. Dans le contexte actuel, les producteurs de maïs et de soja et probablement de blé devraient choisir le programme assurantiel alors que les producteurs de riz préféreront l’option déficiency payment. Quelque soit le système retenu, on retiendra qu’il n’existe plus de boite verte dans la politique agricole américaine, à l’exception des programmes environnementaux et que tous les paiements qu’ils soient assurantiels ou paiements compensatoires, sont basés désormais sur la production réelle de l’exploitation (ou des rendements récents), c'est-à-dire qu’ils sont couplés. Alors que les Américains s’étaient faits les chantres du découplage pendant de nombreuses années et qu’ils ont imposé ce concept dans les négociations de l’OMC.


Aide alimentaire




Mais au-delà du soutien aux agriculteurs, la particularité de la politique agricole américaine est de privilégier l’aide alimentaire au plus démunis. Sur les quelques 1.000 milliards de dollars prévus pour les dix ans qui viennent au titre du Farm Bill, 775 milliards sont dédiés aux bons alimentaires, (food stamps) auxquels il faut ajouter 238 milliards d’aide alimentaire non inclus dans le Farm Bill destiné à l’enfance (cantines scolaires, programme en faveur des mères célibataires…). Alors que les soutiens stricto sensu à l’agriculture n’atteignent pour la période que 156 milliards de dollars dont 89,6 milliards (9 milliards par an) pour les subventions aux assurances agricoles et 66,6 milliards (6,6 milliards par an) pour les programmes de soutiens. Les programmes environnementaux de leur coté relèvent à 65,3 milliards, soit 6,5 milliards par an, essentiellement dédiés à la Réserve foncière. Sur ce plan la différence entre le Sénat et la Chambre des Représentants porte sur les économies à réaliser. Les Sénateurs ont adopté un programme d’économies de 5 milliards de dollars, alors que la Chambre des Représentants est plus sévère : elle ferait économiser 35 milliards sur dix ans, dont 16,5 milliards sur le programme alimentaire. Théoriquement le nouveau Farm Bill doit entrer en vigueur le 30 septembre prochain. D’ici là, le nouveau texte doit être adopté en séance plénière par la Chambre des Représentants, puis un compromis doit être trouvé avec le Sénat pour harmoniser les positions. L’essentiel du débat porte sur le niveau des économies à réaliser dans le programme d’aide alimentaire. Entre l’aide gauche du parti démocrate qui se refuse à toute réduction de l’aide alimentaire et l’aide droite du parti républicain, surtout le Tea Party, partisan de coupes sombres, le compromis, à ce stade, parait difficile à obtenir, surtout à l’approche des élections présidentielles du mois de novembre prochain. D’où une hypothèse de plus en plus évoquée actuellement : la prorogation d’un an du Farm Bill actuel.