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Interview de Xavier Beulin, président de la FNSEA

Une ambition pour l’agriculture française

Selon le président de la FNSEA, le nouveau ministre de l’Agriculture
devra se mobiliser sur la réforme de la Pac et l’amélioration de la
compétitivité de l’agriculture française. S’il n’est pas hostile, par
principe, aux mesures de verdissement, il préconise une approche plus
pragmatique des dossiers.
Par Publié par Cédric Michelin
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Comment avez-vous accueilli l’arrivée du nouveau ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll ?

Xavier Beulin :
Nous connaissons bien l’homme. Il a une maîtrise parfaite des sujets agricoles et un intérêt pour ces dossiers. En tant que parlementaire européen et membre de la Commission agricole, il a une vision européenne de l’agriculture. En outre, contrairement à ce que l’on pouvait craindre, nous avons un ministère de plein droit et non un secrétariat d’Etat et un ministre de plein exercice. Ceci est un bon signal sur le plan politique, notamment vis-à-vis des autorités européennes, où il importe que la voix de la France soit entendue à sa juste mesure. Enfin et comme nous le souhaitions, le ministre de l’Agriculture englobe l’agroalimentaire, ce qui permet d’avoir une approche cohérente des relations entre l’amont et l’aval, de la production jusqu’au consommateur. Pour tout ce qui concerne les problèmes de qualité, de sécurité sanitaire, de concurrence, d’export… L’agriculture française est diverse. Et sa richesse tient à la fois aux circuits courts et de proximité et aux filières longues exposées à la concurrence et présentes sur les marchés internationaux. Son caractère pluriel doit être reconnu et il ne faut pas opposer les deux démarches qui sont complémentaires.

Quels sont, de votre point de vue, les dossiers prioritaires sur lesquels le ministre de l’Agriculture devra se mobiliser ?

XB :
J’en vois trois. D’abord sur le plan international, le G20, qui s’est tenu en France, fin 2011, et auquel il faudra donner une suite pour lutter contre l’instabilité des matières premières agricoles et la spéculation financière. Sur le plan européen, c’est bien entendu la Pac qui occupera une grande partie de la feuille de route du ministre. Il y a surtout la dimension budgétaire sur laquelle je ne cache pas mes inquiétudes sur le maintien du budget agricole. Quant au contenu de la réforme, nous ne sommes pas systématiquement hostiles au verdissement, mais il y a des améliorations à apporter. Nous avons d’ailleurs fait des propositions en ce sens qui ont été reprises par les rapports des parlementaires européens, Michel Dantin et de Capoulas Santos. Enfin sur le plan intérieur, j’insiste sur l’organisation des filières, l’installation des jeunes, l’emploi et surtout sur la nécessaire compétitivité de l’agriculture française. La France doit retrouver sa capacité productive pour tirer la croissance, créer des emplois et contribuer à améliorer nos comptes extérieurs. Elle dispose d’atouts importants : des terres en abondance, du savoir-faire, de produits diversifiés qu’il est indispensable de mettre en valeur. Le problème est que notre environnement économique et réglementaire est très compliqué.


Pragmatisme




N’êtes-vous pas inquiet de la suppression annoncée de la TVA emploi qui ne va pas dans le sens de la restauration de la compétitivité ?

XB :
Les filières fruits et légumes, l’élevage dans une certaine mesure souffrent de réels problèmes de compétitivité. Et d’une façon générale, le mode de financement de la protection sociale basé sur les salaires pénalise l’activité en France et favorise les importations. Ceci étant, ce qui importe c’est d’avoir une réponse au problème posé. Si la TVA n’est pas retenue, il faudra faire autre chose. Je doute que l’augmentation de la CSG préconisée par les Socialistes soit la bonne solution car elle ne concerne pas les produits importés.

Qu’attendez-vous de la nouvelle ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’énergie, Nicole Bricq ?

XB :
Plutôt connue comme rapporteur de la Commission des Finances au Sénat, elle n’est pas pour autant novice sur les questions d’environnement. Elle a publié un rapport sur la fiscalité environnementale, il y a quelques années. Je lui dirai ce que j’ai toujours dit qu’il ne faut pas avoir une approche uniquement défensive de l’environnement et du tout réglementaire qu’il s’agisse des zonages, des bassins d’alimentation de captage, mais qu’il importe d’intégrer les connaissances scientifiques et les réalités locales. En outre, je lui dirai aussi qu’il faut être offensif ne serait-ce que pour le stockage de l’eau par exemple. J’ajoute que nous sommes également concernés par le nouveau ministère de l’Egalité des territoires et du Logement dont la titulaire est Cécile Duflot, la patronne d'EELV (Europe Ecologie Les Verts). Nous n’entendons pas nous désintéresser de tous les problèmes liés aux services publics en milieu rural, l’accès aux soins, à la santé, au haut débit, à la culture...qui concernent aussi les agriculteurs. J’insiste d’autant plus là-dessus que nous devons tirer les leçons du vote du premier tour de l’élection présidentielle qui a vu nombre de Français donner leurs suffrages aux extrêmes, surtout dans les zones périurbaines et rurales. Il y a « les indignés », mais il y a aussi « les oubliés » de nos territoires, auxquels il faut apporter des réponses.