Reproduction des vaches allaitantes (2e partie)
Une fonction de luxe…
La semaine dernière, nous avons abordé les conséquences de la conduite d’élevage ainsi que l’impact du logement et de l’état sanitaire du troupeau sur la reproduction. Cette semaine, nous nous consacrons à l’importance de l’alimentation pour la reproduction des vaches allaitantes.
La reproduction est une fonction de luxe pour l’animal. Les besoins alimentaires des bovins évoluent au cours de son cycle de production, c’est pourquoi les aliments distribués doivent fournir aux animaux les composants utiles à leurs fonctions vitales (= besoins d’entretien), leur croissance et leur lactation. La reproduction est une fonction de luxe qui n’est assurée que si les autres besoins sont couverts. Les rations distribuées aux bovins doivent donc être équilibrées en azote, énergie, minéraux, vitamines et oligo-éléments pour couvrir les besoins nécessaires à toutes ces fonctions (voir graphique ci-dessous).
Les déséquilibres de l’alimentation sont les causes majeures d’anœstrus et donc d’augmentation de l’intervalle vêlage-vêlage (IVV). Le tableau 1 montre les principales relations entre alimentation et reproduction.
On remarque qu’à peu près tous les déséquilibres alimentaires ont été invoqués dans la genèse de troubles de la reproduction. Parmi ces anomalies de la ration, le rôle de l’alimentation énergétique est dominant dans le risque d’infertilité bovine, mais les excès azotés et les mauvaises conduites de l’alimentation minérale sont aussi fréquemment en cause.
Facteurs liés au niveau énergétique
Déficit énergétique
- Avant vêlage
Dès la fin de gestation, le déficit énergétique favorise des difficultés de vêlage d’où un risque de métrites accru. Rappelons que les métrites
–souvent sous-estimées en élevage allaitant– empêchent ou retardent l’apparition des chaleurs en freinant la sécrétion des prostaglandines ce qui entraine le maintien du corps jaune et le blocage du cycle. De plus, en cas de fécondation de l’ovule, l’inflammation du milieu utérin s’oppose à la nidation ce qui entraîne une mortalité embryonnaire d’où des retours en chaleurs décalés.
- Après vêlage
Le déficit énergétique en fin de gestation (dernier mois de gestation) joue également un rôle négatif sur la croissance folliculaire et la qualité des follicules d’où un allongement de la période d’anœstrus. Ce cas est fréquemment rencontré chez les primipares qui ont encore des besoins de croissance pas toujours couverts en fin de gestation d’où des difficultés à les « faire remplir » pour leur seconde gestation.
Le déficit énergétique après vêlage affecte de manière directe la fécondité en perturbant l’activité hormonale de l’axe hypothalamus-hypophyse-ovaire. Il existe donc une relation négative entre déficit énergétique et performances de reproduction. Le déficit énergétique est souvent apprécié à travers l'amaigrissement des vaches en début de lactation, grâce à la notation de l'état corporel. On constate une tendance générale vers une détérioration des performances de reproduction lorsque la perte d'état corporel après vêlage s'accroît. Cependant, on note que tant que cette perte d'état reste inférieure à 1 point (échelle de 0 à 5), l'influence de l'amaigrissement sur la reproduction reste modeste alors qu'elle devient importante lorsque la perte d'état corporel atteint ou dépasse 1,5 point.
- Excès énergétique
Le syndrome de la vache grasse avant vêlage n’est pas souhaitable car cela provoque différents troubles métaboliques (mobilisation accrue des réserves corporelles : cétoses) et des difficultés au vêlage liées à l’excès de tissu adipeux dans la filière pelvienne d’où un risque de métrites accru.
Pour maîtriser l’état corporel des vaches en fin de gestation, il est donc important de surveiller attentivement ses vaches depuis le sevrage pour ne pas leur laisser prendre trop de gras à 6-7 mois de gestation, et ne pas hésiter à reconcentrer leur ration au cours des 8-9 mois de gestation pour éviter un déficit énergétique avant vêlage.
En effet, une vache grasse (NEC > 3,5) a une capacité d’ingestion réduite. Une vache fortement en état doit donc être davantage soutenue sur le plan énergie-protéines en fin de gestation qu’une vache en état moyen (contrairement à beaucoup de fausses idées reçues qui préconisent de « serrer les vaches grasses avant vêlage »).
Facteurs liés au niveau protéique
- Excès d’azote soluble
L’excès d’azote soluble (sur des rations à base d’herbe jeune ou d’ensilage d’herbe trop riche), particulièrement lorsqu’il est associé à un déficit en énergie, favorise les avortements et les rétentions placentaires. Cet excès d’azote peut également perturber la phagocytose et donc augmenter le risque de métrites. Un excès d’azote dégradable influe également directement sur la fécondabilité : augmentation du taux d’urée et d’ammoniac, effet toxique potentiel sur les spermatozoïdes et l’ovocyte voire l’embryon… (Enjalbert F., 1998).
- Déficits protéiques
Un déficit en azote (absence de correcteur azoté sur une ration riche en énergie à base de céréales par exemple) favorise les non-délivrances et donc les métrites. Rappelons qu’un déficit d’azote dégradable entraîne indirectement un déficit énergétique de par une moins bonne digestion ruminale.
Facteurs liés à l’apport minéral
L’apport minéral aura un impact fort sur les conditions de vêlage qui impacteront par la suite sur la reprise d’une activité sexuelle normale.
- Carences en calcium et magnésium
Le déficit de calcium et/ou du magnésium (disponibilité du calcium dépend pour partie du magnésium) diminue la tonicité utérine ce qui favorise les vêlages difficiles, les non-délivrances, les retards d’involution utérine et par là-même les métrites. En pratique pour prévenir ce risque, vous pouvez apporter 100 g de chlorure de magnésium/vache/jour (en mélange dans la ration) dans les dix jours qui précèdent le vêlage.
- Carences en oligo-éléments et en vitamines
Les oligo-élements essentiels pour la reproduction sont le sélénium, l’iode, le cuivre, le cobalt, le managnèse et le zinc.
Les bovins allaitants n’étant pas forcément minéralisés toute l’année, les carences en oligo-élements sont courantes dans nos élevages. La restauration des statuts peut se faire sous forme de cure (= apport d’un supplément très concentré en oligo-éléments sur une courte période). Il est important de réaliser ses cures avant vêlage afin qu’elles soient doublement valorisées : pour la santé du veau d’une part, pour la mise à la reproduction ultérieure d’autre part. Si les apports sont bien conduits avant vêlage, et éventuellement entretenus une fois par semaine pendant la période hivernale, une cure d’oligo-éléments avant la mise à la reproduction ne devrait pas être nécessaire.
L’impact de l’alimentation sur les résultats de reproduction est souvent sous-estimé. Pourtant, au niveau physiologique, la reproduction reste une fonction « de luxe ». La gestion par l’éleveur de l’alimentation, la conduite sanitaire du troupeau et les pratiques autour du vêlage, sont autant de facteurs qui peuvent favoriser ou nuire à la reproduction des vaches.
Cécile Chuzeville
Les déséquilibres de l’alimentation sont les causes majeures d’anœstrus et donc d’augmentation de l’intervalle vêlage-vêlage (IVV). Le tableau 1 montre les principales relations entre alimentation et reproduction.
On remarque qu’à peu près tous les déséquilibres alimentaires ont été invoqués dans la genèse de troubles de la reproduction. Parmi ces anomalies de la ration, le rôle de l’alimentation énergétique est dominant dans le risque d’infertilité bovine, mais les excès azotés et les mauvaises conduites de l’alimentation minérale sont aussi fréquemment en cause.
Facteurs liés au niveau énergétique
Déficit énergétique
- Avant vêlage
Dès la fin de gestation, le déficit énergétique favorise des difficultés de vêlage d’où un risque de métrites accru. Rappelons que les métrites
–souvent sous-estimées en élevage allaitant– empêchent ou retardent l’apparition des chaleurs en freinant la sécrétion des prostaglandines ce qui entraine le maintien du corps jaune et le blocage du cycle. De plus, en cas de fécondation de l’ovule, l’inflammation du milieu utérin s’oppose à la nidation ce qui entraîne une mortalité embryonnaire d’où des retours en chaleurs décalés.
- Après vêlage
Le déficit énergétique en fin de gestation (dernier mois de gestation) joue également un rôle négatif sur la croissance folliculaire et la qualité des follicules d’où un allongement de la période d’anœstrus. Ce cas est fréquemment rencontré chez les primipares qui ont encore des besoins de croissance pas toujours couverts en fin de gestation d’où des difficultés à les « faire remplir » pour leur seconde gestation.
Le déficit énergétique après vêlage affecte de manière directe la fécondité en perturbant l’activité hormonale de l’axe hypothalamus-hypophyse-ovaire. Il existe donc une relation négative entre déficit énergétique et performances de reproduction. Le déficit énergétique est souvent apprécié à travers l'amaigrissement des vaches en début de lactation, grâce à la notation de l'état corporel. On constate une tendance générale vers une détérioration des performances de reproduction lorsque la perte d'état corporel après vêlage s'accroît. Cependant, on note que tant que cette perte d'état reste inférieure à 1 point (échelle de 0 à 5), l'influence de l'amaigrissement sur la reproduction reste modeste alors qu'elle devient importante lorsque la perte d'état corporel atteint ou dépasse 1,5 point.
- Excès énergétique
Le syndrome de la vache grasse avant vêlage n’est pas souhaitable car cela provoque différents troubles métaboliques (mobilisation accrue des réserves corporelles : cétoses) et des difficultés au vêlage liées à l’excès de tissu adipeux dans la filière pelvienne d’où un risque de métrites accru.
Pour maîtriser l’état corporel des vaches en fin de gestation, il est donc important de surveiller attentivement ses vaches depuis le sevrage pour ne pas leur laisser prendre trop de gras à 6-7 mois de gestation, et ne pas hésiter à reconcentrer leur ration au cours des 8-9 mois de gestation pour éviter un déficit énergétique avant vêlage.
En effet, une vache grasse (NEC > 3,5) a une capacité d’ingestion réduite. Une vache fortement en état doit donc être davantage soutenue sur le plan énergie-protéines en fin de gestation qu’une vache en état moyen (contrairement à beaucoup de fausses idées reçues qui préconisent de « serrer les vaches grasses avant vêlage »).
Facteurs liés au niveau protéique
- Excès d’azote soluble
L’excès d’azote soluble (sur des rations à base d’herbe jeune ou d’ensilage d’herbe trop riche), particulièrement lorsqu’il est associé à un déficit en énergie, favorise les avortements et les rétentions placentaires. Cet excès d’azote peut également perturber la phagocytose et donc augmenter le risque de métrites. Un excès d’azote dégradable influe également directement sur la fécondabilité : augmentation du taux d’urée et d’ammoniac, effet toxique potentiel sur les spermatozoïdes et l’ovocyte voire l’embryon… (Enjalbert F., 1998).
- Déficits protéiques
Un déficit en azote (absence de correcteur azoté sur une ration riche en énergie à base de céréales par exemple) favorise les non-délivrances et donc les métrites. Rappelons qu’un déficit d’azote dégradable entraîne indirectement un déficit énergétique de par une moins bonne digestion ruminale.
Facteurs liés à l’apport minéral
L’apport minéral aura un impact fort sur les conditions de vêlage qui impacteront par la suite sur la reprise d’une activité sexuelle normale.
- Carences en calcium et magnésium
Le déficit de calcium et/ou du magnésium (disponibilité du calcium dépend pour partie du magnésium) diminue la tonicité utérine ce qui favorise les vêlages difficiles, les non-délivrances, les retards d’involution utérine et par là-même les métrites. En pratique pour prévenir ce risque, vous pouvez apporter 100 g de chlorure de magnésium/vache/jour (en mélange dans la ration) dans les dix jours qui précèdent le vêlage.
- Carences en oligo-éléments et en vitamines
Les oligo-élements essentiels pour la reproduction sont le sélénium, l’iode, le cuivre, le cobalt, le managnèse et le zinc.
Les bovins allaitants n’étant pas forcément minéralisés toute l’année, les carences en oligo-élements sont courantes dans nos élevages. La restauration des statuts peut se faire sous forme de cure (= apport d’un supplément très concentré en oligo-éléments sur une courte période). Il est important de réaliser ses cures avant vêlage afin qu’elles soient doublement valorisées : pour la santé du veau d’une part, pour la mise à la reproduction ultérieure d’autre part. Si les apports sont bien conduits avant vêlage, et éventuellement entretenus une fois par semaine pendant la période hivernale, une cure d’oligo-éléments avant la mise à la reproduction ne devrait pas être nécessaire.
L’impact de l’alimentation sur les résultats de reproduction est souvent sous-estimé. Pourtant, au niveau physiologique, la reproduction reste une fonction « de luxe ». La gestion par l’éleveur de l’alimentation, la conduite sanitaire du troupeau et les pratiques autour du vêlage, sont autant de facteurs qui peuvent favoriser ou nuire à la reproduction des vaches.
Cécile Chuzeville