Autunois et région creusotine
La bonne viande charolaise est toujours en rayon

Dans l’Autunois et la région creusotine, les éleveurs locaux continuent d’approvisionner directement les rayons boucherie de deux grandes enseignes. En cette période perturbée par le coronavirus, les éleveurs invitent les consommateurs confinés à redécouvrir les saveurs de la bonne viande charolaise.

La bonne viande charolaise est toujours en rayon
L’association « Saveurs de Nos Prairies Autunoises » compte une vingtaine d’adhérents de l’Autunois-Morvan. Elle fournit environ trois femelles de boucherie chaque semaine au magasin Leclerc d’Autun.

Au fil des jours, l’impact du confinement dévoile ses effets sur la filière alimentaire. Si la continuité de la chaîne est encore assurée et que les consommateurs parviennent à s’approvisionner, les circuits différenciés sont chamboulés. Ainsi dans les micro-filières « Saveurs de nos Prairies Autunoises » et « Union des Éleveurs Locaux », la consommation hebdomadaire a baissé d’environ un quart en volume dans les Leclerc d’Autun et du Breuil, témoigne Jean-Philippe Raze, chevillard à l’abattoir d’Autun. Dans ces deux filières où associations d’éleveurs et distributeurs étaient parvenus à structurer un partenariat gagnant-gagnant avec un approvisionnement planifié, les commandes tombent désormais au jour le jour, au gré des comportements imprévisibles des consommateurs. « Redoutant le risque par contact humain, les clients délaissent tous les rayons traditionnels », confie André Huguet, patron du Leclerc du Breuil. « La baisse est compensée par le libre-service, le Drive, le surgelé et dans le cas de la boucherie, cette compensation se fait par de la volaille et du steak haché », détaille le responsable.

Steaks, surgelés, nouilles, papier hygiénique…

Si le volume global de viande vendue en grande distribution ne recule pas, voire même progresse, cela ne profite pas aux filières locales. « Les clients ont des préoccupations très alimentaires. Les repas de famille ne sont plus possibles », fait remarquer André Huguet. Du coup, on se focalise sur des achats de première nécessité en mettant de côté le festif, l’achat plaisir…

Un changement d’habitude qui pèse sur les filières de proximité qui ont vu les commandes baisser dès la première semaine de confinement. D’autant qu’il a fallu encaisser aussi la mise à l’arrêt des cantines. Habituellement, l’association « Saveurs de nos Prairies Autunoises » écoulait cent kilos de viande bovine auprès de la cuisine centrale de la communauté de communes du Grand Autunois. Un chiffre divisé par deux depuis la fermeture des écoles. Seuls sont maintenus les repas portés à domicile, confie Jean-Philippe Raze qui approvisionne la cuisine centrale. Heureusement, le chevillard autunois parvient à « replacer » cette viande d’avants à d’autres clients. Mais les stocks de bêtes sur pieds commencent à gonfler et les éleveurs des deux associations sont contraints de garder des animaux pourtant prêts à être abattus. « Nous gardons les bêtes autant que nous le pouvons, mais certaines finissent par être écoulées ailleurs. On perd alors au moins 40 centimes d’euros par kilo et on perd aussi des kilos car une vache qui n’est pas tuée sur place (à Autun) perd entre 1 et 2% de rendement de carcasse », explique Gilbert Desmorieux, président de l’association « Saveurs de nos Prairies Autunoises ».

Soutenir la production locale

Aussi, les adhérents des deux associations lancent-ils un appel aux consommateurs en les encourageant à continuer d’acheter de la viande bovine produite localement. La production n’est en effet pas du tout affectée par le coronavirus. « Les éleveurs continuent d’engraisser des bonnes bêtes sur leurs exploitations. Nos associations continuent de planifier les sorties avec notre chevillard qui va voir tous les animaux en ferme et assure l’approvisionnement des deux magasins Leclerc. L’abattoir d’Autun tourne à plein régime. Et notre viande est toujours parfaitement identifiée », fait valoir Gilbert Desmorieux.

Un bon morceau de bœuf pour Pâques !

À l’heure où un effet pervers de la mondialisation (pandémie) nous explose à la figure, on redécouvre soudainement l’intérêt d’être plus autonome dans bien des domaines. Avec le matériel médical, l’alimentaire figure en tête. Savoir que sa viande provient d’un animal qui n’a parcouru que quelques dizaines de kilomètres, que son abattage de proximité a généré des emplois locaux sont autant d’arguments susceptibles d’apporter des réponses rassurantes aux consommateurs déboussolés. D’autant plus qu’en achetant cette viande locale, les habitants de la région témoignent leur soutien à des éleveurs qui sont leurs voisins et qui ne demandent qu’à régaler les familles. Ce n’est pas parce qu’on est confiné qu’il faut se refuser un bon morceau de bœuf ! Bien au contraire, en ces circonstances particulières, il est recommandé de se faire plaisir !

D’ailleurs pour Pâques, les Leclerc du Breuil et d’Autun ne dérogeront pas à leurs habitudes puisque deux bovins de boucherie qui auraient dû concourir à Autun seront en magasin au Breuil et cinq autres à Autun. Comme chaque année, la viande de ces bêtes d’exception sera mise en valeur en rayon.

Les micro filières d’Autun et du Breuil

L’association « Saveurs de Nos Prairies Autunoises » compte une vingtaine d’adhérents de l’Autunois-Morvan. En temps normal, elle fournit entre 2,5 et trois bêtes par semaine à l’hypermarché Leclerc d’Autun. Cela équivaut à deux jusqu’à huit bovins par adhérent et par an bénéficiant d’une plus value de +40 centimes d’euros du kilo par rapport à la cotation officielle. Ce qui correspond à un bonus d’environ 200 € par animal, témoigne Gilbert Desmorieux. Avec le Leclerc du Breuil, le même type de micro-filière existe autour de « l’Union des Éleveurs Locaux ». Elle fournit en principe entre trois et quatre génisses ou jeunes vaches par semaine. Depuis le confinement, les deux associations ont vu leur nombre hebdomadaire de bêtes diminuer d’environ une unité.

Commercialisation difficile pour les bêtes de concours
Un peu plus de 300 bovins de boucheries devaient participer aux concours d’Autun et Romenay.

Commercialisation difficile pour les bêtes de concours

Les deux concours de bovins de boucherie pour les fêtes de Pâques ont été annulés en Saône-et-Loire. À Autun, ce sont 210 bêtes de haute qualité qui étaient attendues et à Romenay, les organisateurs en avaient inscrits 110. Ce sont donc plus de 300 gros bovins charolais que les éleveurs avaient préparés avec soin. À Autun, une centaine de génisses avait été engagée ainsi que vingt culardes, 60 jeunes vaches… À Romenay, on dénombrait aussi une soixantaine de génisses… Pour les éleveurs et engraisseurs qui ont préparé ces bêtes d’exception, le devenir de ces animaux soulevait de vives inquiétudes avec la perspective de fêtes de Pâques très compromises. Dans les jours qui ont suivi la date des deux concours, éleveurs et opérateurs de la filière tentaient de trouver des solutions pour valoriser au mieux les animaux. Un certain nombre de ces culardes, génisses et autres vaches étaient déjà retenues par des bouchers, supérettes, clients habituels. À titre d’exemple, 14 femelles prévues pour Romenay ont été achetée par le magasin Super U de Prissé. Cinq autres bovins sont allés au Super U de Saint-Amour dans le Jura, rapporte Noël Favre, président du concours de Romenay. Idem pour la boucherie Allamant en Haute-Savoie qui n’a pas dérogé à sa règle de se fournir exclusivement en culardes extra de Saône-et-Loire. À Autun, la société d’agriculture a fait le choix de distribuer ses plaques de concours aux éleveurs engagés. « Les acheteurs les demandent aux éleveurs », rapporte Roger Brochot, président de la société d’agriculture. Ces plaques étaient perdues de toute façon et elles ont coûté 2.700 € à la société d’agriculture, confie le président. Rien que pour le concours de Romenay, ce sont plus de 8.000 € de dépenses que les organisateurs avaient déjà engagés pour un concours qui n’a pas pu avoir lieu. Du côté des gros opérateurs de la filière, en milieu de semaine dernière, personne ne se précipitait sur ces bêtes de concours restées en ferme. « Nous avons très peu de commandes », confiait Yves Jehanno de Feder. En fin de semaine dernière, le groupement n’était parvenu à écouler que vingt bêtes de concours contre 80 d’habitude. La plupart des grandes enseignes ont fermé leurs rayons traditionnels, rapportait-on. Du coup, les opérateurs incitent les éleveurs à faire attendre leurs animaux au gré des opportunités. « On espère un retour de la demande festive sur le mois de mai quand le déconfinement aura redonné l’envie de déguster des bons morceaux à griller », concluait un opérateur.