Vins de Bourgogne
Le négoce toujours en demande avant la nouvelle campagne vracs

Cédric Michelin
-

Mardi 10 octobre, le Bureau des vins de Bourgogne donnait rendez-vous aux médias pour tirer un premier bilan des vendanges qui s’annoncent « belles en quantité et en qualité ». Une bonne nouvelle qui devrait rassurer les marchés toujours très demandeurs. De plus, les négociants n’ont toujours pas reconstitué leurs stocks.

Le négoce toujours en demande avant la nouvelle campagne vracs
Laurent Delaunay et François Labet

Une vingtaine de journalistes de la presse et des médias, locaux comme nationaux, s’asseyait au premier étage du « nouveau vaisseau amiral » des vins de Bourgogne, la Cité des vins à Beaune. Les présidents du BIVB, François Labet et Laurent Delaunay affichaient une « mine réjouie ». 2023 marque une seconde « belle récolte en quantité et en qualité », malgré une saison culturale complexe avec des alternances climatiques jusqu’à mi-août, des aléas (grêles…) par endroits et des vendanges à rallonge. En effet, les premiers coups de sécateurs pour les crémants ont débuté fin août dans le Mâconnais pour ne se terminer que fin septembre dans les Hautes Côtes de Beaune et de Nuits pour les vins tranquilles. Dans de nombreux endroits, il a même fallu occuper ou libérer les vendangeurs entre deux périodes de vendanges, crémants et vins tranquilles ou même chardonnays et pinots.

Un sondage est en cours pour estimer le volume de récolte en attendant les déclarations de récoltes. Les chiffres définitifs seront dévoilés lors de la vente des Hospices de Beaune, mais d’ores et déjà, tout le monde se satisfaisait de la « quantité » après avoir subi la perte de l’équivalent d’une récolte (1,5 million d’hl en moyenne) en l’espace de seulement trois campagnes (surtout en 2021 avec une récolte de 700.000 hl). « Nous avons besoin de reconstituer nos stocks et stabiliser nos prix », indiquait François Labet en regardant son homologue du négoce, qui ne disait pas le contraire.

14 mois de stock seulement

En effet, malgré « deux belles récoltes consécutives », les négociants n’ont toujours pas reconstitué leurs stocks, car la demande a été très forte à la sortie Covid. « La récolte 2023 devrait permettre un retour à la normale pour reconquérir nos parts de marché et nos clients, car avec la petite récolte 2021, nous n’en avions pas assez », reconnaissait Laurent Delaunay. En juillet 2022, les stocks ne dépassaient pas 11 mois de ventes à venir contre 14 mois de stock en juillet 2023 seulement. Le négoce est donc toujours à la recherche de vins à acheter. Avec des disparités évidemment selon « les rotations en régionales plus rapides qu’en grands crus » et ses durées d’élevage plus longues. Les « transactions sur le marché primaire », comme le nomme le négociant, soit les ventes vracs entre vignerons et négoces, ont été le fait à 95 % du millésime 2022 (récolte de 1,75 Mhl), et quasiment aucun autre millésime. La hausse des cours s’en est ressentie (+14 % comparativement à la moyenne cinq ans).

La France qui rit, la France qui pleure

Si la Bourgogne continue de surnager dans le marasme des vignobles de France, des nuages semblent poindre à l’horizon. En France, l’inflation de ces deux dernières années, laissant une croissance atone, provoque un recul des ventes en GMS : -3 % sur les vins de « grandes consommations » (VSIG), -5 % tous vins confondus (avec vins de pays) et même de -6 % pour les seuls vins AOC, catégorie la plus impactée. Dans ce panorama, difficile de situer la Bourgogne avec son manque de vin suite à 2021. Malgré tout, la vigilance est de mise avec un recul de -15 % en volume. Le chiffre d’affaires ne reculant cependant que de -5 %, confirmant la montée en gamme et partant de plusieurs années à forte croissance.

Côté restauration, les clients et touristes sont toujours affamés et assoiffés de sorties post-Covid, avec des hausses de 19 % en valeur et 15 % en volume de vins de Bourgogne consommés.

Les États-Unis ont des stocks

Le « club des cinq » (USA, UK, Belgique, Canada, Japon) a connu une baisse sur le premier semestre 2023, mais déjà, « un frémissement » s’opère sur le second semestre, veut croire le président délégué du BIVB en charge des questions économiques. Avec là encore, « un phénomène de renchérissement des prix qui se poursuit par inertie », relevait Laurent Delaunay. L’appellation mâcon (+10 %) a tiré son épingle du jeu notamment en « sortant plus tôt » des vins sur ces marchés. Les régionales, chablis (+2 %) et crémants (+6 % volume) ont repris leur marche en avant aussi côté volumes de ventes. Japon et Angleterre sont aux achats alors que les États-Unis marquent le pas, car ayant fait des stocks plus importants. Enfin, Chine, Hong Kong, Taïwan et Singapour montent doucement en puissance.

Avec plus de vins à commercialiser, le BIVB va « relancer » nombre de dégustations pour les professionnels, acheteurs et prescripteurs étrangers, notamment avec un Grand Bourgogne Tour qui fera étape dans cinq métropoles de France et des dégustations prévues en Scandinavie, Londres, Tokyo… L’objectif étant toujours de communiquer sur les « appellations méconnues et accessibles qui constituent 65 % des volumes à moins de 10 € », concluait François Labet, questionné par de nombreux journalistes sur la cherté de certains crus.