EXCLU WEB / Europe : Les ministres planchent sur les engrais

Les ministres de l’Agriculture ont accueilli sans enthousiasme la communication de la Commission européenne sur les engrais. Ils lui reprochent son manque d’ambition et des financements inadaptés et insuffisants.

EXCLU WEB / Europe : Les ministres planchent sur les engrais

« Nous sommes confrontés à une crise sans précédent des engrais minéraux depuis les années 1970. 70 % des installations européennes, productrices d’engrais, sont actuellement fermées du fait d’une utilisation intensive en matière première. La disponibilité et le caractère abordable des engrais reste fragile. Les engrais sont trois à cinq fois plus chers par rapport à l’année précédente. Il y a eu une diminution de l’achat des quantités d’engrais et cela impacte déjà la production et le prix des denrées alimentaires, déjà atteintes par l’inflation ». Janusz Wojciechowski, le commissaire européen à l’Agriculture, a dressé un constat sans concession de la situation du marché des engrais, particulièrement perturbé depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, lors du Conseil des ministres européens de l’Agriculture, le 22 novembre à Bruxelles. Ainsi, la Commission européenne reconnait le caractère fondamental des engrais dans la chaîne alimentaire et leur usage pour garantir la sécurité alimentaire. En revanche les solutions proposées ont laissé les ministres sur leur faim. Le Commissaire préconise de favoriser en Europe la production d’engrais verts, de réduire la dépendance européenne aux importations et de développer une autonomie stratégique avec une industrie « résiliente et durable ». Mais sans dire précisément comment s’y prendre, même si la Commission a déjà autorisé des accords d’importation d’engrais azotés et à base d’ammoniac avec l’Egypte et l’Algérie et suspendu les droits de douane sur les importations d’urée issues des Etats-Unis notamment.

Réserve de crise

Par contre les ministres ont été très attentifs à la communication du ministre espagnol, Luis Planas, sur la disponibilité des engrais et leur caractère abordable qui vise à aller plus vite et plus loin que la Commission européenne. « Il faut garantir une sécurité d’approvisionnement avant la période d’ensemencement. Il faut des mesures concrètes à court terme pour soutenir les exploitants. L’usage de la réserve de crise (évoquée par le commissaire) doit rester une exception et non la norme », a-t-il indiqué. Quatorze délégations l’ont soutenu. Notamment le ministre français, Marc Fesneau qui a insisté sur la nécessité de renforcer à moyen et long terme « l’autonomie stratégique de l’UE avec des financements en dehors de la PAC ».

C’est notamment cette question du financement qui suscite le plus de réserves chez les ministres, y compris le ministre français, et notamment le recours à la réserve de crise de la PAC dont l’enveloppe n’atteint que 450 millions d’euros et est largement insuffisante au regard des besoins. « Une fois la crise passée, quelle sera notre marge de manœuvre face à une crise future », s’est interrogé pour sa part le ministre allemand de l’Agriculture. Réponse catégorique du commissaire. « La Commission ne dispose pas d’autres instruments en dehors de la Pac pour aider les producteurs d’engrais ou même les agriculteurs », en renvoyant aux Etats le soin d’agir dans le cadre des plans stratégiques nationaux, des aides d’Etat ou des plans énergétiques nationaux pour soutenir les producteurs d’engrais.

Nul doute que le sujet reviendra à l’ordre du jour des prochains conseils des ministres, notamment celui de décembre prochain.